Italie - Suisse - Restitutions

Un trésor étrusque caché dans les ports francs de Genève restitué à l’Italie

Par Nathalie Eggs · lejournaldesarts.fr

Le 9 février 2016 - 530 mots

GENEVE (SUISSE) [09.02.16] - Quarante-cinq caisses d’antiquités étrusques provenant de fouilles illicites et cachées par un marchand ont été retrouvées dans les ports francs de Genève. Elles ont été rendues à l’Italie par la justice genevoise. La Suisse vient de modifier sa législation sur le blanchiment d’argent.

Un vaste ensemble d’objets étrusques pillés (bustes, pots en terre cuite, bas-reliefs, fresques…) a été retrouvé aux ports francs de Genève. Répartis dans 45 caisses, les objets étaient cachés depuis 2001. L’ensemble, estimé à 15 millions d’euros, a été restitué jeudi 16 janvier par la justice genevoise à l’Italie, a révélé Le Temps.

Le propriétaire de ce trésor pillé n’est autre que Robin Symes, un marchand d’antiquités controversé. Aux côtés de Giacomo Medici et Robert Hecht, il a alimenté un trafic illicite de biens culturels, en fournissant les plus prestigieux musées occidentaux, jusqu’au scandale qui a entaché le J Paul Getty Museum.

Pourtant, sa chute n’a rien à voir avec ce trafic. Empêtré dans un conflit avec la famille de son défunt amant, Christo Michaelides (mort mystérieusement dans les escaliers de la cave de la villa italienne où il séjournait en vacances avec Robin Symes), le marchand a été poussé à la faillite. Le père de Christo Michaelides, Dimitri Papadimitriou, a en effet déboursé des millions pour que la famille obtienne de la justice la moitié de la fortune de Robin Symes.

Le 21 janvier 2005, Robin Symes a été condamné à deux ans de prison (il n’en fera que 7 mois) par la justice britannique. Ne pouvant satisfaire au paiement de ses créanciers, ses avoirs ont été gelés et son passeport lui a été confisqué. Mais avant cela, en 2003, il s’était rendu à Genève. Ce séjour lui a permis de cacher son butin aux ports francs.

Recel
S’estimant lésée par la restitution des antiquités étrusques à l’Italie, la société entrepositaire agissant pour le compte de Robin Symes a fait recours. « Cette dernière prétendait au paiement des frais de garde et se prévalait d’un droit de gage primant la remise de la confiscation des 45 caisses », relate Le Temps. Le Tribunal pénal fédéral a rejeté ces motifs, en soulignant la mauvaise foi de l’entrepositaire, qui avait déposé les caisses sans assurance et sans inventaire. En outre, la réputation de Robin Symes étant de notoriété publique dans le milieu, l’entrepositaire ne pouvait ignorer ou suspecter la provenance illégale des objets.

Loi sur le blanchiment d’argent renforcée au 1er janvier 2016
Les ports francs de Genève étant régulièrement touchés par des affaires peu reluisantes, les autorités tentent d’adapter la législation au marché de l’art. La loi fédérale du 10 octobre 1997 concernant la lutte contre le blanchiment d’argent et le financement du terrorisme (Loi sur le blanchiment d’argent, LBA) a notamment été renforcée. Auparavant, en droit suisse, l’infraction préalable au blanchiment devait être un crime (art. 10 al. 2 CP) ; depuis le 1er janvier 2016, ce peut-être un délit fiscal qualifié. Si des fonds proviennent d’une fraude fiscale liée aux impôts directs, qu’ils arrivent en main d’un acteur du marché de l’art, et que celui-ci adopte un comportement qui serait une entrave à l’identification de cet argent, alors il risque d’être considéré comme blanchisseur.

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