Une trop brève histoire du passé

Par Jean-Christophe Castelain · lejournaldesarts.fr

Le 23 septembre 2015 - 430 mots

PARIS [23.09.15] – Le Louvre offre une lecture intelligente et passionnante de 5 000 ans d’histoire, adaptée d’un ouvrage de Jacques Attali. Une démonstration qui méritait beaucoup plus que les couloirs qui lui ont été alloués.

Alors que le Musée d’Orsay consacre 1 500 m² à une exposition aussi racoleuse que misogyne sur la prostitution, le Louvre n’accorde que 1 100 m² à une exposition qui raconte 5 000 ans d’histoire. C’est bien dommage car le sujet est autrement plus enrichissant. L’ouvrage de Jacques Attali, Une brève histoire de l’avenir (2006), l’un des plus ambitieux de son abondante bibliographie, tente de recenser les « invariants » du passé pour imaginer le futur. Un sujet tellement ambitieux qu’il est traité en deux lieux : au Louvre l’histoire, avec des œuvres majoritairement anciennes et aux Musées Royaux des Beaux-Arts de Bruxelles les scénarios du futur à travers des productions contemporaines.

Paris et Bruxelles ont toutes deux produit une exposition intelligente et passionnante (1). Le Louvre a puisé dans son fond considérable et s’est fait prêter des pièces majeures qui illustrent le propos avec limpidité. Ainsi les nombreux objets archéologiques de Mésopotamie rappellent opportunément que l’ancienne Irak est le berceau des cités, fondatrices des sociétés humaines. Une carte du monde datant de 1504 et faisant apparaître un embryon de côtes américaines témoigne de l’esprit de conquête des hommes. Un cycle de tableaux de l’américain Thomas Cole datant de 1836 et jamais exposé en France justifie à lui seul la visite. Il représente cinq moments clef d’une ville romaine : du paysage intact où la ville sera bâtie à sa destruction par les dieux. On ne pouvait trouver mieux pour symboliser le cycle des empires. De même la célébrissime Tête mécanique (1919) de Raoul Haussmann (Centre Pompidou) métaphorise l’homme moderne.

Hélas, les espaces concédés sont inadaptés à la hauteur de vue du sujet et les envies d’en savoir plus qu’il suscite. D’autant que Jean de Loisy, le co-commissaire de cette exposition avec Dominique de Font-Réaulx a tenu à disposer des œuvres contemporaines souvent démesurées. Conçues pour être des « respirations » dans le parcours selon la terminologie officielle (et plusieurs telles Diary of Clouds d’Ugo Rondinone offrent de réels moments de poésie) elles compliquent le parcours. Par endroit, par exemple dans la section dévolue aux sociétés modernes, les oeuvres et thèmes s’entrechoquent dans un étroit corridor.

Tout cela n’enlève rien à une exposition réjouissante pour les sens et pour l’esprit mais laisse un arrière-goût de frustration.

Note

(1) Le Journal des Arts publiera un compte rendu complet de ces deux expositions dans une prochaine édition.

Légende photo

Domenico Zampieri, dit le Dominiquin, La Sybille de Cumes, détail, 1616-1617 © Foto Scala, Firenze - su concessione Ministero Beni e Attività Culturali

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