Politique

Nouvel assaut à l'Assemblée nationale contre le mécénat

Par Alexis Fournol (Avocat à la cour) · lejournaldesarts.fr

Le 23 juin 2014 - 591 mots

PARIS

PARIS [23.06.14] - Deux amendements pour la loi de finances rectificative pour 2014 pourraient toucher le paysage culturel français. Outre la volonté de quatre députés de diminuer les avantages fiscaux liés au mécénat, les musées privés pourraient de nouveau bénéficier d'un taux de TVA à 5,5 % sur leur billetterie.

Dès 2003, le député Gilles Carrez (UMP) considérait la loi du 1er août 2003 relative au mécénat, aux associations et aux fondations, comme une niche fiscale dont il fallait contrôler strictement les effets. À l'occasion de l'examen du projet de loi de finances rectificative pour 2012, l'actuel président de la Commission des finances et sa collègue Marie-Christine Dalloz (UMP) avaient déposé un amendement visant à réduire la part du don déductible de 60 % à 50 %, dans la limite de 1 pour mille du chiffre d'affaires des entreprises, au lieu de 5 pour mille actuellement.

Rejetée à l'époque, la même réduction des avantages fiscaux liés au mécénat est aujourd'hui proposée aux termes de l'amendement n°115 au projet de loi de finances rectificatives 2014. Au-delà de la rigueur budgétaire, trois arguments sont avancés. « Plusieurs autres dispositifs et dépenses budgétaires concourent au même objectif » selon les signataires. Par ailleurs, le coût budgétaire engendré par la loi du 1er août 2003 aurait été multiplié par sept en dix ans, passant de 90 millions d'euros en 2004 à 635 millions d'euros en 2014. Enfin, le nombre d'entreprises bénéficiaires aurait été multiplié par près de 5 durant la même période, les PME ne représentant que 10 % des actuelles 32.000 entreprises bénéficiaires.

Et c'est sans fard, que l'exposé sommaire dévoile la vision du mécénat sous-tendue par l'amendement. Ramener la réduction d'impôt à 50 % du montant des dons permettrait d'éviter que ce dispositif « ne soit source d'optimisation fiscale pour les grandes sociétés, dont certains cabinets de conseil se sont fait une spécialité ». Nul doute que l'ADMICAL se saisira très prochainement de la question.

La billetterie des musées privés, très affectée depuis 2012 par une augmentation progressive du taux de TVA applicable de 4,5 points, pourrait, quant à elle, enfin retrouver des marges de manœuvre d'ici au 1er janvier 2015. L'amendement n°53 de Marc Le Fur propose, en effet, de modifier l'article 278-0bis du code général des impôts afin de rétablir le taux réduit de TVA de 5,5 % aux entrées des musées privés. Mais, à la différence de la proposition de loi déposée le 1er avril 2014 par le député Christian Kert (UMP), visant uniquement les musées gérés par des personnes morales de droit privé afin de leur appliquer le taux super réduit de TVA (2,10 %), le présent amendement revêt un champ d'application bien plus large. L'ensemble des sites de loisirs et culturels privés sont ainsi concernés. L'exposé de l'amendement est à cet égard limpide. Sur les cinq exemples de sites listés aucun musée, mais uniquement des centres de loisirs ou des parcs à thème. Deux de ces sites, le parc zoologique de Thoiry (78) et la cité de la Mer (50), comptent parmi les signataires de l'amendement des députés de leur circonscription. Si au nom de la cohérence fiscale et de l'égalité de traitement entre le cinéma, le spectacle vivant et les sites de loisirs et culturels, le présent amendement annonce une éventuelle bonne nouvelle pour les musées privés, ceux-ci s'avèrent cependant moins choyés qu'aux termes de la proposition de Christian Kert. Quant à décrire les sites de loisirs comme « le lieu du premier – et souvent le seul – accès à la culture », l'amendement laisse songeur.

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Le Musée Jacquemart André, Musée privé - © Photo Christophe Recoura - 2007 - Licence CC BY-SA 3.0

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