Le ministère de la Culture expérimente l’art dans les entreprises

Par Jean-Christophe Castelain · lejournaldesarts.fr

Le 9 avril 2014 - 664 mots

PARIS [09.04.14] – Aurélie Filippetti a présenté mardi 8 avril, trois initiatives visant à introduire l’art dans les entreprises, dont un programme de micro-expositions qui démarrera en octobre prochain. L’absence de moyens pérennes pose la question de leur devenir dans le temps.

« C’est une nouveauté radicale » affirme dans un grand sourire destiné à Aurélie Filippetti, Rodolphe Rapetti, le commissaire de l’Entreprise à l’œuvre, un nouveau programme d’exposition d’art dans les entreprises, esquissé par la ministre lors de ses vœux en janvier dernier. Puis il cède la parole à Maurice Fréchuret, directeur des musées nationaux des Alpes-Maritimes qui rappelle que déjà en 1953 Fernand Léger avait accroché plusieurs de ses tableaux, dont « Constructeurs » à la cantine de la Régie Renault.

Le Musée national Fernand Léger est l’un des 9 musées qui prêteront des œuvres pour des « micro-expositions » dans 9 entreprises en région en octobre 2014. Les entreprises ne sont pas encore connues et le seront d’ici juillet, mais l’on connaît déjà les musées prêteurs, tous relevant de la tutelle nationale. Outre le Musée Fernand Léger, participent le Musée national du Moyen Age, le Musée national de la Renaissance à Ecouen, le Musée national des arts asiatiques Guimet, le Musée national Marc Chagall à Nice, le Musée du Quai Branly, le Mobilier national, la Cité de la céramique à Sèvres et le Centre des arts plastiques.

Chaque établissement se dessaisira pendant une semaine maximum de 5 à 10 œuvres, sur un thème particulier. La RMN a été priée d’apporter son appui logistique à l’opération, pour un coût estimé de 60 000 euros par micro-exposition, financés par le ministère. Thierry Crépin-Leblond se dit « enthousiaste ». C’est pour le directeur du Musée de la Renaissance qui va prêter 8 portraits, « l’opportunité d’inciter les salariés à venir après dans le musée ». Il compte particulièrement adapter la médiation (cartel, intervenants) avec ce nouveau public. Maurice Fréchuret, lui, ne sera plus là pour conduire l’opération puisqu’il part en retraite en juillet.

Des œuvres d’art appartenant aux collections nationales peuvent-elles être prêtées à des entreprises ? « Oui » affirme Rodolphe Rapetti, la loi le permet. Ce qui n’empêche que le gouvernement veut inscrire dans le projet de loi Patrimoine en préparation un article ainsi rédigé qui enlèverait toutes les ambiguïtés juridiques : Art. L.113-1. - L'Etat peut, dans un objectif culturel et sous son contrôle scientifique et technique, prêter ou déposer des biens culturels appartenant à ses collections aux institutions publiques et organismes de droit privé agissant à cette occasion sans but lucratif, qui remplissent les conditions, définies par les services du ministère chargé de la culture, permettant d'en assurer la conservation, notamment en matière de sécurité et de sûreté, ainsi que l'exposition et la médiation culturelle auprès des publics.

Que se passera-t-il après cette première étape ? C’est ici que cette initiative sympathique manque de souffle. Malgré les intentions affichées dans le dossier de presse : « L’Entreprise à l’œuvre est appelée à s’inscrire dans la durée », la ministre n’a pas indiqué lors de la conférence comment l’opération allait être pérennisée. Or pour que la manifestation produise des effets, ce n’est pas 9 micros expositions qu’il faudrait, mais des centaines partout en France. En privé, les services du ministère disent compter sur la défiscalisation de la loi mécénat pour inciter les entreprises à solliciter ces expositions auprès de correspondants qui vont être nommés dans les DRAC. La ministre a d’ailleurs annoncé qu’elle compte bien inciter les musées territoriaux à prendre le relais.

Pour garnir le bouquet des messages, et une salle très peu remplie de journalistes, la ministre a également annoncé des résidences d’artistes sur des sites industriels et une convention cadre avec divers représentants des comités d’entreprise qui vise à favoriser des partenariats entre une institution culturelle et un comité d’entreprise. Mais là aussi, à l’instar du programme « phare » (mais l’est-il encore ?) d’Education Artistique et Culturelle et de « L’entreprise à l’œuvre », l’absence de moyens pérennes et à hauteur des ambitions affichées, les rangent, pour l’instant, dans la catégorie des opérations de communication.

Légende photo

Musée National Fernand Léger, Biot, Alpes-Maritimes - © Photo Hans G.Oberlack - 2013 - Licence CC BY-SA 3.0 

Le Journal des Arts.fr

Inscription newsletter

Recevez quotidiennement l'essentiel de l'actualité de l'art et de son marché.

En kiosque