Qui siphonne le budget de l’Ermitage ?

Par Emmanuel Grynszpan, correspondant à Moscou · lejournaldesarts.fr

Le 16 septembre 2013 - 408 mots

MOSCOU (RUSSIE) [16.09.13] – De nombreuses irrégularités ont été constatées dans les dépenses de rénovation de la nouvelle aile du Musée de l’Ermitage qui doit ouvrir en 2014. La police soupçonne des détournements de fonds.

Le ministère de l’Intérieur a été contraint de sévir après la révélation d’un énorme dépassement de budget sur la restructuration de l’aile orientale de l’Ermitage, qui vient de rouvrir temporairement. La Cour des comptes a signalé de nombreuses irrégularités dans les comptes de deux sociétés (Intarsia et Temp) à qui les travaux de rénovation ont été confiés. La police parle d’un trou de 50 millions de roubles (1,16 million d’euros), mais soupçonne des malversations totalisant en réalité des dizaines de millions d’euros. Une centaine de policiers ont été mobilisés et des descentes ont été menées dans les bureaux des sociétés incriminées, ainsi qu’au domicile de leurs dirigeants.

La rénovation de l’aile orientale du bâtiment de l’Ermitage a fait la Une des journaux la semaine dernière alors que l’ardoise a dépassé de presque 50 % le coût initial prévu. Les travaux démarrés en 2008 devaient au départ puiser 239 millions d’euros dans le budget fédéral russe. Mais au final, le chiffre atteint 339 millions d’euros, a indiqué le directeur du Fonds d’investissement de la mairie de Saint-Pétersbourg Andreï Vassiliev.

Ce dernier a tenté de minimiser l’affaire en soulignant une clause dans le contrat de construction autorisant des dépassements de budget « causés par l’inflation ou par des coûts imprévus », explique-t-il dans un entretien au quotidien Vedomosti.

La controverse n’a pas empêché le ministre de la Culture, Vladimir Medinski, de déclarer que « Le Louvre envie désormais l’Ermitage».  L’aile orientale de l’Ermitage, également appelée Etat Major, est l’un des plus vastes espaces du musées avec 60 000 m². Elle abritera des collections de la Russie tsariste et d’oeuvres étrangères contemporaines de cette époque ; des galeries consacrées aux collections Chtchoukine et Morozov, un musée de la Garde et une collection de Fabergé.

Siphonner des fonds alloués à la restauration du patrimoine culturel russe est une tradition bien ancrée depuis le gigantesque scandale de la rénovation du Kremlin dans les années 90. Les récents travaux sur les grands théâtres lyriques (Mariinsky et Bolchoï) ont abouti à des scandales retentissants. A chaque fois, les sommes détournées dépassent la centaine de million d’euros. La tradition se perpétue d’autant mieux que les coupables bénéficient de protections, et la justice se contente de punir des figures de moindre envergure.

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Musée de l'Hermitage fondé en 1764 sous le règne de Catherine II de Russie (1729-1796) - Saint-Pétersbourg - Russie - © Photo Zubro - 1999 - Licence CC BY-SA 3.0

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