L’artiste, la carte et le territoire

L'ŒIL

Le 23 avril 2012 - 362 mots

« Atlas critique » se présente comme une construction intellectuelle complexe et avant-gardiste, qui puise ses sources dans les théories critiques contemporaines comme les post colonial studies (« études post-coloniales »).

Les commissaires de l’exposition, Aliocha Imhoff et Kantuta Quiros, associés dans une structure curatoriale baptisée « le peuple qui manque », ont choisi le motif de la carte. Ils s’inspirent de la démarche intellectuelle du géographe – pas le géographe traditionnel tel qu’on le connaît en France, mais celui, critique, des pays anglo-saxons. Leurs choix artistiques ne sont pas moins pointus. Des artistes, venus de différents points du globe, s’emparent du motif de la carte pour réinventer le monde, en redessiner les frontières, de manière critique et militante.

Pedro Lash a créé une nouvelle carte du continent américain, d’une couleur rouge sang, et en a remis deux exemplaires à des migrants sur le point de traverser la frontière américano-mexicaine – une des cartes à conserver, l’autre à renvoyer à l’artiste après l’arrivée. Deux d’entre elles figurent dans l’exposition et portent les stigmates des intempéries et des aléas du voyage. Présentée avec un texte du migrant qui évoque son parcours, l’œuvre est montrée pour la première fois en France.

Ces contre-cartographies interrogent les politiques contemporaines de manière provocante, comme la carte de France qui brûle du collectif Claire Fontaine. D’autres artistes s’emparent non plus seulement de la représentation de l’espace, mais de l’espace public lui-même, par des performances, des manifestations ou parodies de manifestations. L’installation vidéo The Green Line montre la performance de Francis Alÿs marchant à Jérusalem en retraçant la « ligne verte », qui suit la frontière internationalement reconnue après l’armistice de 1948 entre Israël et Palestine, frontière aujourd’hui gommée par la colonisation israélienne. Des artistes internationaux et des collectifs venus de Russie, d’Amérique latine ou des États-Unis, peu familiers du public français, balisent ce parcours stimulant.

Ce travail met en lumière une étonnante communauté de pensée composée d’artistes, de chercheurs, de théoriciens, qui interrogent les politiques contemporaines, réinterprètent la construction du monde et expérimentent d’autres représentations.

Information

« Atlas critique : une carte blanche au peuple qui manque », Parc Saint-Léger - Centre d’art contemporain, avenue Conti, Pougues-les-Eaux (58), www.parcsaintleger.fr

Cet article a été publié dans L'ŒIL n°646 du 1 mai 2012, avec le titre suivant : L’artiste, la carte et le territoire

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