Bibliothèque nationale de France, site Richelieu - Paris 2e

David d’Angers : c’est qui les bosses”‰?

Jusqu’au 25 mars 2012

Par Dominique Vergnon · L'ŒIL

Le 26 janvier 2012 - 417 mots

Son expérience du dessin, qu’il aimait évoquer, fut d’une grande utilité à David d’Angers (1788-1856) pour passer à l’élaboration de ses bustes et de ses médaillons.

Il se servit par exemple d’un délicat profil exécuté en 1826 au crayon graphite de Casimir Delavigne pour réaliser quelques années plus tard un médaillon en bronze de ce dernier, reprenant toute l’expressivité du visage et les mêmes ondulations de sa romantique chevelure. Car le propos de cette présentation inédite est de montrer par le biais des cent quatre médaillons choisis parmi les quelque cinq cents effigies que le sculpteur produisit en une trentaine d’années, combien le goût de l’époque allait vers une représentation « en beau des traits les plus humbles ».

Mais observateur aigu des caractères des hommes qu’il fait entrer dans son panthéon personnel, David d’Angers, pour rendre à chacun son unicité et sa beauté propre, s’appuie d’abord sur leurs bosses, révélatrices des qualités ou des défauts de chacun. La phrénologie est à la mode. À partir des travaux d’un neurologue allemand, on estime que la forme du crâne reflète les aptitudes d’une personne. Mieux que tout autre critère, les bosses indiqueraient la constitution de l’âme humaine. David connaît et applique la théorie. Ses profils idéalisent le génie des artistes, des écrivains, des poètes, des musiciens qui posent pour lui. Le statuaire passionné qu’il est puise dans cette science une nouvelle approche de son art. Modelant à l’ébauchoir sa boule de cire rouge, il donne au visage de solides reliefs, il utilise saillies et méplats pour traduire les facultés des modèles. Les fronts puissants de Goethe et de Stendhal renvoient aux mentons volontaires de Bolívar et de Kléber, le nez acéré de Schiller mène à l’arcade enfoncée de Lamennais. 

Pourtant, si David d’Angers était convaincu de la validité de cette doctrine, il avait assez de talent pour savoir la dépasser et donner une image à la fois originale et flatteuse des visages. Ses contemporains ne s’y trompèrent pas, sachant que la postérité les jugerait à travers l’œuvre d’un maître soucieux d’autres codes physiques. Théoricien certes, il fut surtout un témoin impartial. Les plâtres originaux exposés en apportent la preuve. Le passage de la main sur la matière tendre marque les émois de l’artiste « obligé d’accentuer les formes de la nature pour tâcher de l’égaler ». Dommage que cette exposition intéressante n’ait pas davantage de visibilité.

Voir « David d’Angers, les visages du romantisme »

BNF – Richelieu, Musée des monnaies, médailles et antiques, 5, rue Vivienne, Paris-2e, www.bnf.fr

Cet article a été publié dans L'ŒIL n°643 du 1 février 2012, avec le titre suivant : David d’Angers : c’est qui les bosses”‰?

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