Annus horribilis du Mexique en France

Par Jean-Christophe Castelain · L'ŒIL

Le 11 mars 2011 - 382 mots

Conçue comme un outil diplomatique et de rapprochement des peuples, l’année du Mexique en France tourne au désastre.

À ce jour, trois expositions ont été annulées après les refus de prêts d’œuvres de la part des autorités mexicaines : des objets archéologiques à Saint-Romain-en-Gal, « Diego Rivera » à Bordeaux et les Mayas à la Pinacothèque de Paris. On imagine bien les conséquences de ces annulations. À la déception des équipes qui travaillent depuis de longues années sur ces projets s’ajoutent le manque à gagner sur les recettes de la billetterie et les pertes sèches pour les dépenses déjà engagées. Sans compter l’effet calamiteux momentané sur les opinions publiques et la tension diplomatique qui en résulte.  Ni Michèle Alliot-Marie, alors ministre des Affaires étrangères, qui avait imprudemment annoncé son absence aux inaugurations, ni Nicolas Sarkozy, qui avait maladroitement maintenu l’événement tout en le dédiant à Florence Cassez, n’avaient tenu compte du fait que ces prises de position allaient radicaliser l’attitude du Mexique et conduire à son retrait de l’organisation de la manifestation. Cette mesure de rétorsion tout à fait disproportionnée en dit long sur le rapport de force et d’intérêt vu du côté du Mexique. Il y a moins de touristes français que d’Américains dans les hôtels de Cancún. Elle dit aussi la faible considération des autorités mexicaines pour le travail des musées français.  

En définitive, c’est surtout la France qui a perdu dans ce bras de fer diplomatique :  les musées, la diplomatie française et Florence Cassez qui reste en prison au Mexique, sans que l’on sache d’ailleurs ce qu’il en est de sa culpabilité réelle. Le Mexique sait bien que l’opinion publique européenne est volatile et que dans quelques mois elle aura tout oublié. Alain Juppé, le tout nouveau ministre des Affaires étrangères, a du pain sur la planche. 

Il y a cependant deux gagnants dans cette affaire.  Le premier, c’est l’Institut français à qui l’on va peut-être un peu moins demander d’organiser ces années culturelles coûteuses et qui n’ont pas toujours les effets attendus auprès du public. Le second, c’est le musée du Quai Branly qui va pouvoir monter seul son exposition sur les Mayas, car la majorité des œuvres viennent du Guatemala, qui partage avec le Mexique mais aussi avec l’Amérique centrale le territoire de cette civilisation précolombienne.

Cet article a été publié dans L'ŒIL n°634 du 1 avril 2011, avec le titre suivant : Annus horribilis du Mexique en France

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