Yan Pei-Ming, portrait en retour

Par Philippe Piguet · L'ŒIL

Le 24 janvier 2011 - 633 mots

Yan Pei-Ming a le sens de la famille. À la fin des années 1980, alors qu’il n’était encore qu’un jeune artiste méconnu, il proposait à ceux avec lesquels il allait passer la soirée d’aller dîner au restaurant chinois que tenait son père dans le XVIe arrondissement.

C’était chaque fois une vraie fête comme les Asiatiques aiment en faire. La nourriture était de qualité et l’alcool de riz un délice. 

Entre Dijon, Ivry et la Chine
Aujourd’hui que les années ont passé et qu’il est un artiste internationalement reconnu, Ming, comme on l’appelle en n’énonçant que la moitié de son prénom, partage son temps entre Dijon et Ivry-sur-Seine. Dijon, c’est un peu sa ville adoptive, celle où il s’est installé quand il est arrivé en France en 1980 pour y suivre les cours de l’école des Beaux-Arts. Une ville qu’il n’a jamais quittée, où il vit avec femme et enfants et où il dispose d’un très grand espace pour travailler.  Ivry, c’est son « pied à terre » parisien, une vieille usine de métallurgie qui étend ses locaux sur plus de 2 500 mètres carrés ! Il y a établi ateliers et logements et y a fait venir son frère et sa famille pour prendre en main la gestion des affaires courantes. Il y est à l’aise pour réaliser ses grands projets, comme ce magnifique ensemble des Funérailles de Monna Lisa présenté au Louvre en 2008, le seul endroit au monde où il n’aurait jamais imaginé se retrouver.   La cinquantaine tout juste atteinte, les cheveux noirs, longs et lisses, le visage rond et épanoui, habillé simplement, cigare serré entre les dents, Ming n’est pas peu fier du trajet parcouru. Né en 1960 à Shanghai, il est venu en France parce que c’était à ses yeux le seul pays où un artiste étranger pouvait faire ses preuves, et il y a parfaitement réussi.  Depuis lors, s’il retourne de temps en temps en Chine, son pays, c’est la France. Non sans une certaine émotion, il se rappelle cette année 1988 où il participa aux « Ateliers » de l’ARC, au musée d’Art moderne de la Ville de Paris, où il fit une résidence d’artiste à Sète [lire page suivante] et où il intégra l’Institut des hautes études en arts plastiques fraîchement créé par feu Pontus Hultén. Trois événements déterminants pour la suite de sa carrière qui furent suivis quelques années plus tard par son entrée à la galerie Durand-Dessert et un séjour d’un an à la Villa Médicis à Rome.  

Un coureur de fond
Travailleur infatigable, finalement Ming a gagné ce qu’il mérite en suivant une stratégie qui est celle du coureur de fond : sans presse aucune et en suivant son bonhomme de chemin, tout en s’appliquant à occuper le terrain. Peintre absolument, il n’a pas changé sa manière, ni les matériaux utilisés, huile sur toile et grandes brosses, mais il n’a de cesse de multiplier les images d’une humanité qui bouge.  S’il s’est fait une spécialité dans l’art du portrait – de Mao à Pinault en passant par Bruce Lee, mais aussi toutes sortes de figures anonymes –, c’est qu’il est, selon lui, le meilleur miroir du monde dans lequel il vit et s’il s’est adonné au paysage, c’est qu’il est le sujet par excellence d’une origine. Qu’il déclare vouloir s’essayer à réunir ces deux motifs dans le même tableau témoigne qu’il y va chez lui d’une motivation essentielle à dire simplement une présence.

Biographie

1960 Naissance à Shanghai.

1981-1986 Étudie à l’école des Beaux-Arts de Dijon.

1987 Retravaille le portrait de Mao Zedong qui a marqué sa formation en Chine à des fins de propagande.

1991 Premier portrait d’après modèle.

1993-1994 Pensionnaire à la Villa Médicis, à Rome.

Années 2000 Premiers autoportraits.

2009 Expose Les funérailles de Monna Lisa au musée du Louvre.

Yan Pei-Ming est actuellement présenté dans l’exposition collective inaugurale du Mathaf, à Doha.
www.yanpeiming.com 

Cet article a été publié dans L'ŒIL n°632 du 1 février 2011, avec le titre suivant : Yan Pei-Ming, portrait en retour

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