Villa Médicis, Rome

Ellsworth Kelly s’entend avec Ingres

Jusqu’au 26 septembre 2010

Par Bénédicte Ramade · L'ŒIL

Le 23 août 2010 - 370 mots

L’art contemporain se plaît ces temps-ci à réinterpréter ses classiques, allant même jusqu’à s’inventer des généalogies.

Effets collatéraux de l’exposition « Picasso et les maîtres » ? Sans aller jusque-là, force est de constater qu’en juin dernier, c’est Buren que le galeriste Kamel Mennour frottait à Giacometti, alors que Buren lui-même n’a jamais revendiqué cet héritage.

Cette fois, Éric de Chassey a invité Ellsworth Kelly à explorer les fonds français à la recherche d’une conversation secrète. En 2002, il avait exposé au Centre Pompidou un mariage plutôt réussi entre les dessins de plantes de ce dernier et ceux de Matisse.

À l’occasion de cet été romain, le peintre américain a jeté son dévolu sur un illustre occupant qui fut même directeur de la Villa Médicis, Jean-Auguste-Dominique Ingres. Sans pour autant revendiquer une filiation, ni pousser l’hommage jusqu’à la déférence, le moderniste, toujours sémillant à 87 ans, s’est fait plaisir dans les réserves du Louvre, du musée Ingres de Montauban ou du musée de Besançon.

L’exposition ne force heureusement pas les conversations et épargne judicieusement aux artistes comme aux spectateurs l’exercice de la juxtaposition. Elle « conduirait à des comparaisons terme à terme, mortifères si elles ne traduisent pas une véritable relation d’influence », écrit Éric de Chassey dans le catalogue richement illustré.

Quatre toiles dont le magnifique Portrait de Madame Marie Marcotte de Sainte-Marie peint en 1826 (exceptionnellement prêté par l’institution parisienne) et celui de Jean-Baptiste Desdeban, portrait de profil réalisé à Rome, sont complétées par vingt-huit dessins. Ces splendeurs, entre études, détails, académiques et portraits, ont été choisies en regard du trait plus épuré de vingt-huit dessins de Kelly alternant, eux, botanique et visages. Quant aux huiles, elles sont huit et inédites, tranchantes et puissamment colorées, à prendre place dans les salles blanches et sobres de la Villa Médicis.

Avec l’étude stylistique des similitudes et des parentés, vient aussi celle des parcours. Ces deux artistes se sont installés un temps à l’étranger : Paris pour Kelly, Rome pour Ingres. Et surtout, après avoir été aux avant-postes de la création, ils sont finalement devenus des classiques de leur vivant.

Voir

« Jean-Auguste-Dominique Ingres-Ellsworth Kelly », Villa Médicis, Grandes Galeries, Viale Trinità dei Monti, 100187 Roma (Italie), www.villamedici.it, jusqu’au 26 septembre 2010.

Cet article a été publié dans L'ŒIL n°627 du 1 septembre 2010, avec le titre suivant : Ellsworth Kelly s’entend avec Ingres

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