Bernard Frize, le "besogneux"

Par Philippe Piguet · L'ŒIL

Le 22 février 2010 - 554 mots

À deux pas du cimetière du Père-Lachaise, la Ville de Paris a construit dans les années 1970, à destination de petites entreprises, tout un lot de bâtiments dont les voûtes en voile de béton confèrent au quartier un cachet singulier. Faute d’une vraie réussite économique, ils ont été requalifiés au fil du temps et différents créateurs s’y sont installés.

Bernard Frize en a acquis un il y a quelques années et y a installé son atelier sur plusieurs centaines de mètres carrés répartis sur deux niveaux. Un atelier à la mesure d’une carrière internationale construite lentement et sûrement, en parfaite phase avec son caractère. S’il dispose d’un logement dans le Marais, il vit aussi à Berlin, partageant ainsi son temps entre la France et l’Allemagne.
 
Bernard Frize est un homme contenu et réfléchi. Plutôt mince, le cheveu ras, de grosses lunettes cerclées d’écaille, rien ne laisse supposer qu’il est peintre. Et pourtant, la peinture est toute sa vie. Si, à Berlin, il planifie le travail, c’est surtout à Paris qu’il l’exécute et son atelier y est pleinement dédié. Tout y est organisé pour permettre à l’artiste de travailler dans les meilleures conditions : de l’impressionnante rangée de racks métalliques qui lui servent à stocker ses œuvres à un immense plateau qui est le lieu même de la peinture.
 
Le sol, recouvert de grands cartons, est totalement moucheté ; sur un côté, un placard s’ouvre sur une collection de pinceaux soigneusement rangés ; un rétroprojecteur est suspendu au plafond ; quelques tableaux sont accrochés sur les murs ; d’autres en devenir, fraîchement enduits de résine blanche, reposent à plat sur des tréteaux…

Le salut international après la traversée du désert
Né en 1954 à Saint-Mandé, Bernard Frize a fréquenté les écoles d’art d’Aix-en-Provence puis de Montpellier avant de venir s’installer à Paris. S’il partagea un temps son activité de peintre avec celle de moniteur de ski, il put assez vite se consacrer exclusivement à la peinture. Pensionnaire à la Villa Médicis en 1986, il y séjourna deux ans, avant de faire le tour de l’Italie de fond en comble. Il en apprit que le but de l’art n’avait pas changé et que les questions de la peinture étaient toujours les mêmes.
 
Si, côté galeries, Frize a travaillé successivement avec Lucien Durand puis avec Chantal Crousel, il a connu une vraie traversée du désert de 1992 à 2000. Une période qui lui a fait prendre conscience de la nécessité d’aller voir ailleurs et de ne pas se cantonner à l’Hexagone. Ses relations privilégiées avec Suzanne Pagé, Guy Tosatto et Bernhard Burgi, tous trois de grands conservateurs, lui ont permis de passer le cap jusqu’au moment où il est entré chez Emmanuel Perrotin.
 
Depuis lors, on peut dire que les choses vont bon train. Frize est un besogneux – au meilleur sens du terme – dont l’œuvre procède du principe de la série s’appuyant essentiellement sur « le travail du travail », comme il dit. Il aime ainsi à s’inventer toutes sortes de stratégies picturales qui l’entraînent dans le flux d’une production tour à tour ludique, ironique et formelle. Une œuvre polymorphe qui sanctionne le triomphe résolu de la peinture pour elle-même.

Biographie

1954
Naît à Saint-Mandé (94).

1977
Beaux-Arts de Montpellier.

1988
Première exposition personnelle au MAMVP.

2003
Rétrospective « Aplat » au MAMVP.

2010
« Red, Yellow and Blue » à la Simon Lee Gallery (Londres).

« Bernard Frize, Red, Yellow and Blue », Simon Lee Gallery, Londres, www.simonleegallery.com, jusqu’au 24 mars 2010.

Galerie Emmanuel Perrotin, Paris IIIe, www.galerieperrotin.com. Prochain solo show de Bernard Frize programmé au premier trimestre 2011.

Cet article a été publié dans L'ŒIL n°622 du 1 mars 2010, avec le titre suivant : Bernard Frize, le "besogneux"

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