Christian Caujolle, spécialiste de la photographie

Peut-être pas. Le normalien devenu l’un des plus fins connaisseurs de la photo actuelle, le fils de militaire issu d’une famille de petits paysans ariégeois, « pur produit de la République », nommé chef de la photo chez Libé puis directeur de l’agence VU’ ne goûte guère l’idée d’être contraint. Du coup, Caujolle change aussi aisément de sujet, qu’il passe d’une culture à une autre, et parle presque plus volontiers de la littérature hispano américaine qu’il a étudiée, ou de la sculpture de Germaine Richier qui le passionne, que de photo.
Cette disposition, il la doit à une curiosité boulimique, à une appétence insatiable pour autrui et au hasard, qu’il n’a jamais laissé filé. Sinon, comment expliquer qu’il ait « bossé » avec Barthes, bouclé sa thèse avec Bourdieu, débattu avec Foucault, rencontré Deleuze – son « Bacon » reste une référence –, croisé Doisneau, H.C.-B. et Kertész chez Agathe Gaillard, galerie où il « a fait [ses] classes ». Un tel panthéon ficherait le tournis à n’importe qui d’autre ! Pas à lui. Pas plus que ses voyages ne lui donnent le mal du pays. Citoyen du monde, il a vécu au Mexique, prépare un festival à São Paulo, voue une passion pour le Cambodge que lui a fait découvrir Bernard Faucon et Bangkok, « qu’[il] aime parce qu’[il] ne la comprend pas », rêve d’aller au Pérou. Le dénominateur commun à tout cela ? L’émotion. « J’adore quand je suis profondément ému », analyse Caujolle, toujours en quête de sens.