Les bons calculs de l’art du XXe siècle

Par Bénédicte Ramade · L'ŒIL

Le 20 mai 2009 - 367 mots

Comme à son habitude, le ZKM de Karlsruhe se livre à une exploration passionnante de l’art du XXe siècle par le prisme des annotations et des calculs.

Autrement dits, les liens étroits entre logique mathématique et un large spectre artistique. En effet, littérature, musique, peinture, architecture, photographie mais aussi cinéma et chorégraphie s’entremêlent dans une gigantesque exposition de quatre cent cinquante spécimens produits par plus d’une centaine de grands noms. Parmi eux, John Cage, Bertolt Brecht, Le Corbusier, Walter Benjamin, ou bien Oskar Fischinger.
L’exposition entend se focaliser sur le processus de la création, tant dans ses phases préparatoires passant par toutes les configurations possibles de schémas et de conception d’une logique que dans les projets aboutis qui mêlent théorie fondamental et formes. « Notation » se révèle être une manifestation tentaculaire et passionnante. Deux exemples à eux seuls en synthétisent l’esprit : la Symphonie diagonale de Viking Eggeling (1921) et le Pavillon néerlandais conçu par Le Corbusier, Iannis Xenakis avec Edgar Varese en 1958 pour l’Exposition universelle de Bruxelles.
Avec le film expérimental abstrait aujourd’hui labellisé de « dada », Eggeling s’était employé à mettre au point un alphabet universel créé à partir des proportions, du rythme, du nombre, de l’intensité, de la situation, la sonorité, du temps. Le court métrage fait apparaître et disparaître un jeu de lignes lumineuses, complémentaires ou antagonistes, en une suite logique et impérative, loin de l’improvisation dadaïste. « Eggeling cherchait vraiment une sorte de transfusion, disons d’intégration de la science, des mathématiques dans l’art. »
Quant au triumvirat, il conçut pour la firme hollandaise Philips, le temple des nouvelles technologies musicales, une poche stomacale hérissée de trois pointes comme autant de matérialisations du son diffusé. Varese, qui avait suivi des études en ingénierie électroacoustique, apporta son expertise et créa un Poème électronique mêlant des bruits de machines à des accords de piano, des sons de cloches, des voix filtrées et des sons sinusoïdaux purs d’oscillateurs. Le mariage réussi de la technique, de la logique et de l’inspiration artistique, au cœur des interrogations du ZKM. De quoi faire aimer les maths !

« Notation. Calculation and Form in the Arts », ZKM, Lorenzstraße 19, Karlsruhe (Allemagne), http://on1.zkm.de, jusqu’au 26 juillet 2009.

Cet article a été publié dans L'ŒIL n°614 du 1 juin 2009, avec le titre suivant : Les bons calculs de l’art du XXe siècle

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