David Altmejd

Pièces de cristal

Par Roxana Azimi · L'ŒIL

Le 23 mars 2009 - 357 mots

Ceux qui ont aimé le dédale des architectures du Canadien David Altmejd risquent d’être surpris par son exposition de six géants au Magasin de Grenoble.

Le passage de l’horizontal au vertical pourrait être périlleux. Toute la complexité de ses précédentes constructions, où la froideur lisse tranchait avec les têtes de loup-garou cristallisées et l’attirail sadomasochiste, ne risquait-elle pas de fondre dans ces titans miroitants ? Pas vraiment, car les architectures ressemblaient quelque part à des organismes vivants, endormis ou pétrifiés, dont ces golems ne seraient finalement qu’une variante érectile. Ces sculptures se composent de volumes géométriques qui les rapprochent de curieux androïdes. Elles se lardent aussi parfois de barbes en poil de cheval ou d’argile cristallisée en guise de chairs déliquescentes. Oscillant entre animalité et cybernétique, ces titans hybrides se teintent aussi d’animalité.
Chez Altmejd, le goût des sciences flirte avec la science-fiction, l’énergie est aussi biologique que magique. Le loup-garou symbolise la tension entre le bien et le mal, mais aussi, pour le féru de sciences qu’est Altmejd, les manipulations d’un docteur Frankenstein. Le miroir n’est jamais lisse et les géants sont des colosses aux pieds d’argile. Fracassés, mitraillés, presque sanguinolents, ils sont toujours blessés, vaguement rafistolés par des cataplasmes de sel. « L’acte de destruction conduit bizarrement à injecter de la vie », indique l’artiste.
Cassant, le miroir est aussi gaine protectrice. « Si on recouvre un objet de miroirs, il disparaît, confie l’artiste. Il devient transparent, immatériel. J’aime le contraste entre cette dimension-là et le côté lourd, massif, dangereux. » Cet effet miroitant qui est devenu la marque de fabrique d’Altmejd flirte toutefois avec la vanité des présentoirs de parfumerie. Au point de faire dire au critique d’art du Guardian, Adrian Searle : « Le Canadien est doué pour le spectaculaire, à la manière des vitrines des boutiques chics. C’est de l’art pour des gens qui ne sont même pas humains. Les collectionneurs d’Altmejd sont probablement des crapauds d’une autre galaxie recouverts de faux diamants qui possèdent des humains comme animaux domestiques. » (sic !)

A voir

« David Altmejd », le Magasin, 155, cours Berriat, site Bouchayer-Viallet, Grenoble (38), www.magasin-cnac.org, jusqu’au 26 avril 2009.

Cet article a été publié dans L'ŒIL n°612 du 1 avril 2009, avec le titre suivant : David Altmejd

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