L’art monumental oublié de la relance

Par Jean-Christophe Castelain · L'ŒIL

Le 21 janvier 2009 - 392 mots

De toutes les formes d’art actuel, la sculpture monumentale issue de la commande publique est vraisemblablement la plus agissante. Et l’on en comprend bien les raisons, elles sont rappelées dans l’enquête que nous consacrons ce mois-ci à cette pratique historique et associée au pouvoir. Par définition ouverts au public, ces nouveaux monuments acclimatent celui-ci à l’art de son temps. Ils embellissent les villes au moment où la cité, plus que jamais, redevient l’espace social privilégié, au détriment de la périphérie. Ainsi, « l’art à ciel ouvert » fabrique du lien social, fait que les habitants se sentent mieux dans leur ville. Pour une part modeste, certes, mais toute initiative en ce sens est bonne à prendre.

Naturellement, les projets doivent être à la hauteur de ces enjeux. Il ne s’agit pas d’accepter n’importe quoi au motif légitime que l’art est libre. Une sculpture monumentale dans l’espace public doit respecter cet espace, utiliser des matériaux qui ne vieillissent pas, ne pas se confondre avec le mobilier urbain. À cet égard, les commandes publiques qui accompagnent les récents tramways, celui de Nice par exemple, témoignent d’une professionnalisation accrue.

Malheureusement, la volonté politique semble faire défaut là où précisément l’action de l’État pourrait faire levier sur le mieux-vivre-ensemble. Avec un budget annuel de moins de 4 millions d’euros, la commande publique est le parent pauvre de la culture. Son impact est d’autant plus limité que, par une tradition bien française de vouloir faire plaisir à tout le monde, on saupoudre les maigres financements en de multiples petits projets. Le monumental, surtout s’il veut traverser les siècles, est par définition lourd et cher.

Dans son discours de , Nicolas Sarkozy a rappelé son attachement aux « cathédrales et abbayes » et octroyé une rallonge de 100 millions d’euros par an au patrimoine. Tant mieux pour le patrimoine. Mais au moment où partout dans le monde les gouvernements redécouvrent les vertus des grands travaux keynésiens pour relancer une économie qui va dans le mur, multiplier par dix le budget de la commande publique – ce n’est jamais que 40    millions d’euros – aurait un effet d’entraînement pour renforcer la cohésion sociale.
Le président, qui a fait preuve d’une audace remarquée dans son plaidoyer pour l’architecture et le Grand Paris, devrait penser aussi à meubler les rues. Un symbole du pouvoir qui ne devrait pas lui être indifférent.

Cet article a été publié dans L'ŒIL n°610 du 1 février 2009, avec le titre suivant : L’art monumental oublié de la relance

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