L’art ingrat de la nature morte

Par Sophie Flouquet · L'ŒIL

Le 29 septembre 2008 - 355 mots

Le meilleur comme le pire. Tel est le principal grief qui a toujours été formulé à l’encontre de la nature morte. Ce genre, considéré comme le plus mineur dans la hiérarchie académique des arts, a en effet longtemps joui d’une mauvaise réputation.

Le terme français de « nature morte », avec ses accents péjoratifs, est à ce titre significatif quand les Anglo-Saxons lui préfèrent le vocable plus poétique de still life, ou « vie silencieuse », sous-entendant ainsi le rôle symbolique de ces peintures.
Si aujourd’hui ces classifications ont été mises à mal, cet accrochage du musée des Beaux-Arts de Bâle vient toutefois nous rappeler que le genre demeure difficile. Associé aux musées de Francfort, où l’exposition a déjà fait escale, et de Darmstadt, le musée bâlois déroule ici le fil de son histoire, dans une acception géographique limitée au nord des Alpes.
Cimaises bleues et accrochage bas, éclairage parfois mal maîtrisé, le parcours regroupe les peintures de manière à la fois chronologique et thématique (peintures de fleurs, vanités, gibiers…). Au Moyen Âge, alors que la peinture religieuse domine, le genre ne peut que se glisser subrepticement dans des scènes plus ambitieuses, distillant çà et là des objets à forte charge symbolique. La Réforme aidant, avec la proscription d’un grand nombre d’images religieuses, la nature morte peut alors devenir un sujet à part entière. Les étranges vanités – accumulations d’objets autour d’un crâne décharné – réunies ici sont là pour rappeler le caractère vain des plaisirs de l’existence humaine face à la mort qui, elle, est inéluctable.
La nature morte est ensuite poussée à son apogée par quelques maîtres du genre. Ainsi Sebastian Stoskopff (1597-1657), représenté ici par trois chefs-d’œuvre, ou encore les Hollandais du XVIIe siècle avec leurs peintures à l’éclat incomparable, comme Willem Claesz Heda (1594-1680) ou Willem Kalf (1622-1693). Mais trop nombreux sont ici les artistes de moindre envergure, ce qui tend à démontrer que la maîtrise du genre est loin d’être accessible au peintre lambda  !

Voir

« La magie des choses, peinture de nature morte 1500-1800 », musée des Beaux-Arts, St. Alban-Graben 16, Ch-4010 Bâle (Suisse), www.kunstmuseumbasel.ch, jusqu’au 4 janvier 2009.

Cet article a été publié dans L'ŒIL n°606 du 1 octobre 2008, avec le titre suivant : L’art ingrat de la nature morte

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