Maximilien Luce

Chantre du pointillisme social

Par Philippe Piguet · L'ŒIL

Le 20 août 2008 - 614 mots

Figure essentielle du néo-impressionnisme, Maximilien Luce a laissé un œuvre peint puissant et engagé qui, à la différence de ses contemporains les impressionnistes, en fait un peintre témoin de son temps, très singulier.

S'il n’a pas plus de treize ans quand la Commune éclate, le souvenir qu’il en garde l’a marqué à jamais. Mieux : il a façonné sa conscience politique au point que, par la suite, il éclairera sa conduite. D’origine modeste, né à Paris dans le quartier de Montparnasse, Maximilien Luce (1858-1941) n’a pourtant pas fait de carrière politique. Aux côtés de Seurat et de Signac, il compte parmi les artistes qui ont fait du postimpressionnisme un mouvement à part entière.
Après avoir appris le métier de graveur sur bois, suivi un enseignement destiné aux ouvriers des Gobelins, Luce fréquente l’Académie suisse puis l’atelier de Carolus-Duran. Un parcours durant lequel le jeune artiste a engrangé tout un savoir-faire, dans les pas notamment de ses aînés impressionnistes, comme en témoigne La Mère de l’artiste dans le jardin à Montrouge (1877).

Le travail à la mine et le départ à la guerre pour sujets
L’amitié qu’il échange avec les peintres Cavallo-Peduzzi et Léo Gausson l’entraîne dans les années 1880 à adhérer à la technique pointilliste initiée par Pissarro et développée par Seurat. Au Salon des indépendants de 1887, Signac lui achète La Toilette. L’année suivante, sa première exposition personnelle à la Revue indépendante installe sa réputation. Il n’en oublie pas pour autant ses engagements du premier jour, donnant de nombreux dessins dans différentes publications libertaires telles que Le Père Peinard, La Révolte ou L’Assiette au beurre.
Multipliant les paysages relatifs à ses voyages tant à Londres avec Pissarro qu’à Saint-Tropez avec Signac, il participe en 1892 à l’Exposition des peintres néo-impressionnistes, fondatrice du groupe en tant que mouvement uni. Deux ans plus tard, Maximilien Luce et plusieurs de ses compagnons sont accusés de « menées anarchistes ». Écroué à la prison de Mazas puis finalement acquitté, il en tirera un émouvant album de lithographies.
Invité en 1896 par Émile Verhaeren à venir en Belgique, il visite notamment le bassin houiller de Charleroi et découvre la dure vie des mineurs. Dès lors, l’artiste déclinera toute une série d’œuvres aux motifs des Gueules noires, se faisant le chantre de leur condition.
Au début du siècle, tout en revisitant le sujet de la Commune, Luce alterne les images de ses voyages en Bretagne et en Hollande avec toutes sortes de scènes de la vie parisienne. Peintre témoin de son temps, au sens le plus fort de l’expression, Maximilien Luce l’est encore plus avec la série de peintures qu’il brosse en 1915-1916 sur le thème de la guerre. Ses images de gares et de poilus qui y partent ou qui en reviennent s’imposent de façon monumentale.
Par la suite, Luce partage sa vie entre Paris et Rolleboise, près de Mantes-la-Jolie. Poursuivant son œuvre dans cette qualité de touches ponctuées qui a fait son succès, il conforte son image de peintre néo-impressionniste. En 1928, Adolphe Tabarant lui consacre une monographie et, l’année suivante, la galerie Bernheim une importante exposition rétrospective.
Élu en 1935 président de la Société des artistes indépendants, Maximilien Luce épouse cinq ans plus tard celle avec laquelle il partage sa vie depuis près d’un demi-siècle. Un an tout juste avant de mourir.

Biographie

1858 Naissance à Paris. 1876 Entre comme graveur sur bois chez E. Froment. 1879-1883 Service militaire. 1886 Adopte la théorie du divisionnisme de Seurat. 1887 Suit les cours de peinture à l’Académie suisse. Salon des indépendants. 1894 Anarchiste, il est emprisonné pendant 1 mois. 1900 Néglige le divisionnisme pour l’impressionnisme. 1914-1918 Pendant la guerre, peint des scènes de combat. 1941 Maximilien Luce décède à Paris.

Cet article a été publié dans L'ŒIL n°605 du 1 septembre 2008, avec le titre suivant : Maximilien Luce

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