Paul Klee rythmique graphique

Par Manou Farine · L'ŒIL

Le 30 mai 2008 - 375 mots

La rétrospective Paul Klee (1879-1940) à l’affiche durant l’été au musée Albertina promet quelques trésors rarement présentés de ce côté-ci de l’Atlantique.

Paul Klee - 1937© Musée Albertina

Prenant largement appui sur la collection Carl Djerassi jusqu’ici abritée au MOMA de San Francisco, c’est d’abord à l’œuvre graphique – dessins, aquarelles et gouaches – que l’exposition donne la parole. En vérité, la distinction de pratique ne se justifie guère, tant les signes graphiques, formats miniatures et supports fragiles irriguent l’ensemble de l’œuvre.
« Le domaine graphique, explique le peintre, pédagogue et théoricien en 1920 dans son fameux credo du créateur, de par sa nature même, pousse
à bon droit aisément à l’abstraction. Le merveilleux et le schématisme propres à l’imaginaire s’y trouvent donnés d’avance et, dans le même temps, s’y expriment avec une grande précision. Plus pur est le travail graphique, c’est-à-dire plus d’importance est donnée aux assises formelles d’une représentation graphique, et plus s’amoindrit l’appareil propre à la représentation réaliste des apparences. »
Le monde que recrée Klee sans jamais se couper de la nature s’appuie sur un jeu mouvant de signes ou idéogrammes à forte intensité évocatrice. Et c’est bien ce que rappelle l’exposition. Bien qu’affilié un temps au Blaue Reiter et enseignant au méthodique Bauhaus dès 1920, Klee bâtit une syntaxe et une poésie rythmiques singulières dont on suit pas à pas les séquences chronologiques. Parmi elles, les vibrantes constructions de tonalités, aquarelles lumineuses effectuées durant son séjour tunisien au printemps 1914. Dans son journal, Klee notera : « C’est le moment le plus heureux de ma vie. La couleur et moi sommes un. Je suis peintre ! »
De son entrée dans le monde de la couleur, à l’analyse systématique des moyens picturaux expérimentés au Bauhaus, des signes graphiques compacts et archaïques à rythmiques sombres et expansives des dernières années en passant par le vocabulaire vif, pulsatoire et épuré des années 1930, les surfaces s’organisent selon une même logique dynamique d’équilibre entre les motifs. Toujours en quête des sources les plus profondes du processus de création, pour un art qui s’exerce dans la manifestation du visible bien plus que dans sa représentation ou sa reproduction, échappant par là au clivage abstraction/figuration.

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« Paul Klee », musée Albertina, Albertinaplatz 1, A-1010, Vienne (Autriche), www.albertina.at, jusqu’au 10 août 2008.

Cet article a été publié dans L'ŒIL n°603 du 1 juin 2008, avec le titre suivant : Paul Klee rythmique graphique

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