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Une autre façon de faire la foire

L'ŒIL

Le 1 mars 2000 - 612 mots

Un souffle de jeunesse dans un salon d‘antiquités. Paradoxal et pourtant ! Le Pavillon des Antiquaires souffle sa troisième bougie.
« En créant, il y a deux ans, le Pavillon des Antiquaires, explique Patrick Perrin, l’un des fondateurs, nous avons voulu changer de style, ne pas nous cantonner dans les disciplines classiques, ouvrir au contraire un espace convivial et éclectique, un lieu ludique, intergénérations, tout en préservant l’authenticité et la qualité de la marchandise. » Cette orientation définie, encore fallait-il la mettre en pratique. C’est fait. Au sein du Pavillon des Antiquaires, le mélange des genres est provoquant sinon détonnant. Quant aux exposants, ils viennent d’horizons très divers, de très grandes galeries jouxtant de petits nouveaux arrivés tout droit des Puces. Cette mixité voulue ne manque ni de fantaisie ni de fraîcheur ; reste à voir ce qu’elle donne sur le terrain. Du côté des « grands », plusieurs one man show impressionnants. Chez Hopkins-Thomas-Custot, pas moins de 20 Dubuffet. Chez Cazeau-De La Beraudière, une trentaine de Masson de 1923 à 1941. Chez Louis Carré, 40 Villon, un des artistes maison dont la galerie a édité le catalogue de l’œuvre. Pour la peinture ancienne, chez de Jonckheere, un étonnant document sur la Rome du XVIe, Les Jardins du Vatican de Hendrick de Van Cleve. Le grand classique chez Patrick Perrin, avec une table Louis XV de Delorme dont des exemplaires ont eu les honneurs du Metropolitan Museum, du Getty et du Louvre. Une série de chaises Louis XVI provenant de la bibliothèque d’André Malraux chez Gérald de Montleau. Autres marchands de renom : Lefèvre pour la céramique, Dulon et Monbrison pour l’art primitif, Hadjer pour les tapis et tapisseries pour ne citer qu’eux. Et pourtant l’insolite est partout. Au hasard des allées, on découvre Olwen Forest et sa collection de bijoux hollywoodiens créés pour des stars comme Marilyn, Garbo, Vivien Leigh... Chez Epoca, le comble, un fauteuil en pneus et entrelacs de caoutchouc... Entre ces deux extrêmes, les années 40 et 50 qui, à mesure que l’Art Déco se raréfie, montent en puissance. C’est ainsi que l’on trouve à L’Arc en Seine un mobilier de salon de Jean Royère, créé tout spécialement en 1956 pour la maison de l’architecte Nadim Majdalani à Beyrouth où Royère avait ouvert un bureau en 1947.
Or selon Christian Boutonnet, il y a seulement trois ans, on ne parlait guère de Royère. « Pour le mobilier du XXe siècle, affirme le galeriste de la rue de Seine, le Pavillon des Antiquaires n’a pas d’équivalent au monde et la présence de jeunes marchands, dont plusieurs affichent à peine la trentaine, est incontestablement un plus. » Reste que ce salon demeure terriblement franco-français : trois ou quatre Belges venus en voisin et un seul Britannique. C’est mince. Du côté des visiteurs, en revanche, c’est plus varié. Beaucoup d’étrangers dont 50 % d’Américains et, selon Christian Boutonnet, les bataillons d’outre-Atlantique seront particulièrement fournis cette année. Tous les participants le disent : le Pavillon des Antiquaires marche très fort. Les marchands vendent pendant et après, ils y achètent aussi, car les contacts pris avec les particuliers fonctionnent dans les deux sens. Bref, le rendez-vous est sérieux. Or, aujourd’hui, les salons d’antiquaires se succèdent à un rythme soutenu. Il est plus facile de visiter 50 stands en quelques heures que de pousser la porte d’autant de galeries. La formule, plébiscitée par le public, a toutefois ses limites et la multiplication n’est pas sans danger. Sur bien des foires, la prudence est de mise. On voudra vous faire prendre des vessies pour des lanternes et de la copie pour de l’ancien.

PARIS, Espace Eiffel-Branly, jusqu’au 5 mars, tél. 01 53 30 85 20.

Cet article a été publié dans L'ŒIL n°514 du 1 mars 2000, avec le titre suivant : Une autre façon de faire la foire

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