Laura Lamiel

Par Philippe Piguet · L'ŒIL

Le 1 décembre 2000 - 496 mots

Née en 1948 et vivant à Paris, Laura Lamiel présente ce mois-ci à Grenoble des œuvres récentes conçues en fonction de l’architecture des salles du musée. L’espace et la lumière jouent ici avec ses installations d’éléments modulaires et d’objets industriels.

D’une visite à l’atelier de Laura Lamiel, on garde le souvenir indéfectible d’un espace immaculé. Tout y est résolument blanc. « Mon travail se joue dans la pesée », précise d’emblée l’artiste. La formule est mystérieuse. À l’instar de l’œuvre de son auteur. Non seulement de l’œuvre, mais aussi de l’auteur lui-même. Distanciation, retenue et radicalité sont en effet les termes qui les définissent au plus juste, l’une et l’autre, indifféremment. La brique d’acier émaillée, blanche comme neige, qui fonde et module le travail de Laura Lamiel illustre son attitude rigoureuse gouvernée par la quête d’une certaine forme de sublime, conjuguant les pratiques de l’architecture, de la peinture et de la photographie. Sa surface réfléchissante et sa densité matérielle en font le noyau dur d’une démarche qui gagne sa logique de façon involutive en se constituant de la succession des expériences traversées.Toutes conçues à échelle humaine, les œuvres de Laura Lamiel procèdent tant du mode de l’installation que de l’assemblage. Elles exploitent les ressources plastiques d’éléments soit neufs et industriels, soit usagés et récupérés ici et là, visant à dialoguer avec l’espace dans lequel elles sont présentées. Si le corps en est absent, il ne cesse d’y être suggéré. Celui du spectateur y est invité à l’épreuve de toutes sortes de dispositifs et de constructions qui visent à définir le lieu même de leur exposition comme œuvre d’art. Laura Lamiel appartient à cette génération d’artistes qui a été marquée par l’art minimal et par le soin d’établir une pièce dans une étroite triangulation entre les objets qui la composent, l’espace environnant et la déambulation du spectateur. Ses choix plastiques témoignent d’une volonté de tendre vers un extrême, d’aller toujours aux limites de situations ou de contraintes physiques. Son art est en permanence alimenté par des notions de flux, de tension et de mise en abyme, d’autant qu’il s’autogénère à partir de sa propre logique. La couleur blanche, qui recouvre la plupart des œuvres de Laura Lamiel et qui en sanctionne la réalisation comme le sceau d’une identité, agit en tant que fédérateur d’une recherche de silence et d’intériorité. Les installations qu’elle organise, tout comme les images photographiques qu’elle réalise, le sont toujours en résonance avec l’atelier fonctionnant comme « un corps mobile, ouvert aux mutations et aux pérégrinations, périmètre de circulation et de circularité, en expansion perpétuelle dans le temps et dans l’espace » ainsi que l’a justement noté Élisabeth Milon. C’est à pas feutrés, l’esprit et le regard dégagés, qu’il convient d’entrer dans le monde de Laura Lamiel afin de s’inscrire au mieux dans son intimité et faire ainsi l’expérience d’une aventure tout à la fois sensible et mentale, en un lieu source et ressource, au seuil même d’une origine.

- GRENOBLE, Musée de Grenoble.

Cet article a été publié dans L'ŒIL n°522 du 1 décembre 2000, avec le titre suivant : Laura Lamiel

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