fondation

L’orange Eggleston

L'ŒIL

Le 1 décembre 2001 - 257 mots

Eggleston, c’est d’abord une couleur. Entre orange bouddhiste méditatif et roux d’automne mélancolique, la saison des feuilles, comme on dit sur la côte Est américaine, repère habituel de ce photographe d’une soixantaine d’années. Quand il quitte Washington et ses splendeurs arborées, c’est pour aller se réfugier dans son Tennessee natal et capter les rayons mordorés du puissant soleil du Midwest sur le paysage vide de maisons déclassées, de voitures à l’abandon, de boutiques en fin de parcours, traces d’une vie humaine que son objectif se garde le plus souvent de cadrer. Et quand apparaissent une peau, un visage, c’est encore en teintes fanées qu’il veut les traduire, émotion du temps qui passe et disparaît, ne laissant derrière lui que des images... William Eggleston est, selon le mot de John Szarkowski, ancien conservateur de la photographie au Museum of  Modern Art de New York, « l’inventeur de la photographie couleur ». On ignore ce qu’en pensent un Joel Meyerovitz ou un Bruno Barbey. Ni ce qu’en aurait dit un Irwin Blumenfeld. Toujours est-il que l’on reconnaît ses images instantanément, à travers ce regard empreint de lassitude, cet attachement aux signes d’une civilisation, déjà rencontrés chez Walker Evans. Il serait d’ailleurs intéressant de rapprocher les derniers travaux d’Evans (ses polaroïds couleur), des tirages de plaques publicitaires gagnées par une rouille picturale et signés de William Eggleston. Filiation troublante, mais naturelle, dès lors que l’on s’attache aux fantômes du paysage urbain du nouveau monde.

- PARIS, Fondation Cartier, 261, boulevard Raspail, tél. 01 42 18 56 50, 20 novembre-24 février.

Cet article a été publié dans L'ŒIL n°532 du 1 décembre 2001, avec le titre suivant : L’orange Eggleston

Tous les articles dans Expositions

Le Journal des Arts.fr

Inscription newsletter

Recevez quotidiennement l'essentiel de l'actualité de l'art et de son marché.

En kiosque