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Lautrec, un affichiste dans tous ses états

L'ŒIL

Le 1 avril 2002 - 360 mots

Jane Avril, La Goulue, Nini patte en l’air ou Grille d’égout : autant de noms et de figures légendaires des nuits montmartroises que Toulouse-Lautrec a immortalisés dans ses œuvres, au même titre que les lieux qu’il fréquentait (le Chat noir, le Divan japonais, l’Eldorado...). Artiste à la sulfureuse réputation, raillé pour sa difformité, critiqué pour sa vie dissolue, il découvre Montmartre en 1886 et sa première affiche, Moulin Rouge, en 1891, marque le début d’une fascination pour le monde du spectacle, un univers nocturne frivole, coloré, érotique, tourbillonnant de danse et de musique. Dans tous ces endroits où les bourgeois viennent s’encanailler, l’artiste dessine inlassablement. En moins de dix ans, il produit 32 affiches, toutes réunies au Musée Maillol, aux côtés de dessins préparatoires et de différents états. On connaît bien celles qu’il a réalisées pour le chansonnier Aristide Bruant et pour le Moulin Rouge, peut-être moins celles pour les romans de Victor Joze, Babylone d’Allemagne (1894) ou Reine de joie, présentée ici avec un magnifique fusain. Même s’il collabore à la Revue blanche, Lautrec n’a jamais véritablement fait partie du groupe des Nabis. Il se lie pourtant avec Bonnard, s’intéresse au Japonisme, et certaines de ses œuvres montrent des similitudes avec celles de Vallotton, pour les fonds plats et la simplification du dessin. Un art de la synthèse percutant qui sied parfaitement à l’art de l’affiche. L’impact de ses images modernes est immédiat. « Il est plus que certain qu’à lui je dois la célébrité dont j’ai joui dès sa première affiche de moi », dira Jane Avril. Reflet de la légèreté et de l’ivresse des nuits parisiennes, témoignage aussi de vies troublées et dépravées, l’œuvre de Toulouse-Lautrec est d’abord celle d’un amoureux des femmes, artistes, prostituées ou belles inconnues, comme cette mystérieuse Passagère du 54 aperçue lors d’un voyage, sur le pont d’un bateau, et qu’il représente dans son affiche pour le Salon des Cent en 1896.

- PARIS, Musée Maillol-Fondation Dina Vierny, 59-61, rue de Grenelle, tél. 01 42 22 59 58, 8 février-6 mai. A lire : cat. coéd. Musée Maillol/RMN, 32 euros et Bertrand Lorquin, Toulouse-Lautrec, l’art de l’affiche, éd. Gallimard, coll. Découvertes, 7,5 euros.

Cet article a été publié dans L'ŒIL n°535 du 1 avril 2002, avec le titre suivant : Lautrec, un affichiste dans tous ses états

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