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Matisse et Mallarmé, arabesques poétiques

L'ŒIL

Le 1 juin 2002 - 329 mots

En 1930, le jeune éditeur Skira sollicite Henri Matisse pour illustrer les Poésies de Mallarmé. Pendant deux ans, Matisse se consacre à ce projet en créant une multitude de dessins et d’estampes qui aboutiront aux 29 illustrations de l’ouvrage définitif. Cette exposition nous fait découvrir un travail sensuel et délicat où se distinguent de nombreux paysages ainsi qu’un sujet cher à l’artiste, les nus féminins. Sensible à la prose « mallarméenne », Matisse évoque avec douceur la rondeur d’un sein, la courbe d’une hanche ou l’ovale régulier d’un visage. Qu’il s’agisse du Cygne ou de la Chevelure, ses eaux-fortes sont d’une pureté étonnante et semblent se répandre sur les feuilles trop blanches du recueil. Par leur tracé mince et ondoyant, elles font gracieusement écho aux textes de Mallarmé écrits en italique. Derrière l’apparente facilité des lignes coulantes de Matisse se cache une foule de repentirs et de croquis, témoins de sa réflexion artistique. L’artiste a pour habitude de partir d’un dessin détaillé et hachuré qu’il élague progressivement pour atteindre un trait pur et parfait. De ses Vénus aux bras levés à ses portraits intemporels, il ne retient que les lignes essentielles, celles qui rayonnent sur la page et scellent sa signature. La plupart des créations du peintre ont un autre point commun, elles expriment la résonance d’un exil ou d’un travail passé. Ainsi, pour illustrer Brise Marine ou Les Fenêtres de Mallarmé, Matisse puise dans ses souvenirs de voyage à Tahiti. Pour clore ce parcours poétique, une rencontre inattendue devance les portraits de Poe et de Baudelaire : cinq états de La Danse ont été placés en vis-à-vis d’une foule de nymphes issues de L’Après-midi d’un Faune. Par leurs attitudes similaires, ces rondes de naïades et de danseuses ne font que confirmer la complicité de deux artistes qui ne se sont hélas jamais connus : Matisse et Mallarmé.

- VULAINES-SUR-SEINE, Musée départemental Stéphane Mallarmé, pont de Valvins, 4, quai Mallarmé, tél. 01 64 23 73 27, 7 avril-14 juillet.

Cet article a été publié dans L'ŒIL n°537 du 1 juin 2002, avec le titre suivant : Matisse et Mallarmé, arabesques poétiques

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