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Fonctionnalisme et fluidité des formes

Par Marie Maertens · L'ŒIL

Le 1 septembre 2002 - 392 mots

En 1940, Charlotte Perriand est invitée au Japon par le ministère du Commerce et de l’Industrie en tant que conseillère en art industriel. Contrainte d’y demeurer pendant plusieurs années à cause de la guerre, elle arpente le pays et retrouve dans les maisons nippones traditionnelles les principes familiers du Corbusier sur l’harmonie entre l’homme, l’habitat et la nature. Elle y découvre également un aménagement intérieur qui s’organise autour de la notion du vide. A son retour en France en 1946, elle prônera l’épuration des lignes dans une stricte adaptation des formes à leur fonction, idée que l’on retrouve d’ailleurs chez Isamu Nogushi évoquant « quelque chose d’irréductible, une absence de gadget et d’astuce ». Des formes libres inspirées d’artistes comme Kandinsky, Arp, Moore ou Calder s’allient chez ces créateurs à une volonté d’aller à l’essentiel et de se rapprocher de la nature en utilisant des matériaux bruts. L’exposition « Japonisme » à la galerie Downtown retrace les recherches formelles de nombreux créateurs entre 1940 et 1960. Ainsi le bois est très présent dans les tables, chaises ou encore la banquette Tokyo de Charlotte Perriand, qui, après-guerre, travaille beaucoup le pin massif, prolongeant une expérience commencée dès la fin des années 30 et oubliant pour un temps la rigueur du processus industriel. Les tables et banquettes en séquoia et noyer de George Nakashima laissent les nœuds du bois apparents et les bords de planches au naturel. Du sculpteur Isamu Noguchi, sont présentés des « Akaris », ces luminaires à base de papier issu de l’écorce du mûrier, inspirés des lanternes traditionnelles japonaises, ou encore des tables aux lignes ovoïdes faisant référence aux toiles de Tanguy et probablement aux sculptures de Brancusi dont il fut l’assistant. Nogushi assemblait souvent ces formes curvilignes à des éléments géométriques, en une pratique stylistique courante dans les années 50 et qui consistait à séparer visuellement des parties matériellement et fonctionnellement distinctes.
Ainsi, aux arabesques des plateaux pouvaient être associés des piétements coniques ou inversement. Mais l’acier redevient à l’honneur chez Mathieu Matégot, avec son travail de décoration en tôle perforée, ou les luminaires aux formes organiques et aux « yeux noirs », selon les propres termes de Georges Mouille, premier professeur de design de l’Ecole nationale des Arts appliqués, dès 1946.

- PARIS, galerie Downtown, 33, rue de Seine, tél. 01 46 33 82 47, 12 septembre-30 novembre.

Cet article a été publié dans L'ŒIL n°539 du 1 septembre 2002, avec le titre suivant : Fonctionnalisme et fluidité des formes

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