L’art cosmopolite de Raoul Marek

Au château d’Oiron, dans les Deux-Sèvres, haut lieu par excellence de la commande publique en matière d’art contemporain, se tient tous les 30 juin un singulier repas (L’Œil n°527). Il réunit la quasi-totalité des habitants du village dans la grande salle à manger, lesquels bénéficient sur place de leur couvert-assiette à leur profil, verre à leurs initiales et serviette à l’empreinte de leur paume. Conçu tout spécialement par Raoul Marek voilà déjà dix ans, l’ensemble compte parmi les trésors que recèle le château. Si l’artiste, d’origine suisse, vit et travaille entre Paris et Berlin, il n’est en fait d’aucune nation particulière, sinon celle du monde. Intitulée La Salle à manger d’Oiron-La Salle du monde, l’œuvre qu’il y a réalisée s’inscrit dans un projet plus large qui vise à multiplier les actes de ce genre où se rencontrent les gens et se télescopent les cultures. Raoul Marek est un artiste nomade dont la démarche est une réflexion sur « l’ailleurs » et, au-delà, sur la question de l’exil ; rien d’étonnant qu’il ait choisi de la mettre en exergue au Musée Zadkine. Images dédoublées et inversées des Caraïbes, nappes gaufrées de paysages traversés, vision Nord-Sud, têtes sculptées en bois multiplex, chacune des propositions de Marek instruit un climat d’étrangeté, propice à perturber nos habitudes perceptives. C’est l’occasion surtout pour lui d’organiser des rencontres, d’opérer toutes sortes de déplacements, qu’ils soient d’ordre mental ou géographique, personnel ou artistique, de sorte à souligner la différence des rites, des usages et des instruments d’une culture à l’autre. Dans le cadre de cette exposition, l’artiste propose au visiteur de participer à divers événements, notamment en septembre à différents dîners chez des hôtes d’origine étrangère, indienne, camerounaise, américaine et suisse.