Art Basel

Sous les sunlights de la Floride

Par Marie Maertens · L'ŒIL

Le 1 décembre 2002 - 943 mots

Un événement culturel », « un grand succès », « la foire que Miami attendait », à laquelle il est « indispensable de participer », qui va « attirer les collectionneurs du monde entier » et « devenir la foire la plus importante des Etats-Unis »... Bien avant que l’événement n’ait commencé, les commentaires des galeristes étaient dithyrambiques et le pari semblait déjà gagné pour les organisateurs de cette manifestation, petite dernière de l’équipe de la Foire de Bâle. La majorité des galeries présentes en étant des fidèles, forts satisfaits, elles ont tenu à suivre les organisateurs dans cette nouvelle aventure, ce qui explique l’importante liste d’attente pour une foire qui n’a encore jamais existé. Alors Art Basel Miami Beach ne serait que la copie conforme de son aînée ? Pas uniquement. Programmée en 2001 et ajournée en raison des événements du 11 septembre, cette première édition promet d’être un véritable show à l’américaine, combinant événements musicaux, projections de films et visites de collections privées. Les musées de la région ayant même prévu une programmation spéciale pour l’occasion, à croire que c’est la ville entière qui fera salon.
L’exposition principale regroupe 155 galeries, réparties équitablement entre américaines et européennes, auxquelles s’ajoutent une dizaine de galeries d’Amérique latine et trois d’Asie. Les visiteurs pourront admirer une œuvre au pochoir de 1946 de Matisse et une Composition datée 1930 de Léger chez le Suisse Beyeler. De New York : une superbe aquarelle de Nolde de 1925 et une Tête de Jawlensky de 1928 chez Achim Moeller ou une huile de Hans Hofmann de 1942 chez Artemis Greenberg Van Doren. Peter Blum a, quant à lui, choisi des toiles dans une veine plutôt monochrome : un Joseph Marioni de 2002, une huile de Yayoi Kusama datée de 1966, ainsi qu’une « marine » d’Alex Katz de 1994. Artiste que l’on retrouve chez Thaddaeus Ropac, en compagnie d’œuvres de Warhol et de Baselitz. Deux tableaux de 1929, respectivement de Man Ray et Picabia, sont apportés par la Parisienne Marion Meyer, quand la galerie Di Meo a choisi de susciter l’intérêt des Américains pour Fautrier, avec une toile de 1944, ou pour des dessins de Picasso de 1902 à 1970. Du même auteur, une encre sur papier de 1967 est présentée chez le Milanais Tega. On pourra aussi remarquer chez Annely Juda Fine Art (Londres) une maquette pour une Tête de 1917 de Naum Gabo à 800 000 US$ ou un triptyque de Robert Ryman réalisé de 1968 à 1987 à 640 000 US$ ainsi qu’une sculpture de Donald Judd de 1977 et une peinture sur aluminium de Frank Stella de 2001 chez Richard Gray. Ou encore une huile sur toile estampillée De Kooning de 1977 chez Karsten Greve et une construction de Sol Lewitt de 1989 provenant du Bruxellois Bernard Cats. La photo plasticienne revendique également une place d’honneur : des Thomas Struth  et une vue lunaire de Chicago par Vera Lutter de 2001 à 25 000 US$ sont présentés chez le Berlinois Max Hetzler. Des portraits de Pierre Gonnord sont amenés par l’Espagnole Juana de Aizpuru et des Regards de Patrick Tosani par Emmanuel Perrotin. La galerie japonaise Taka Ishii propose une installation composée de vues de Tokyo, avec notamment les Rivers de Naoya Hatakeyama à 55 000 US$ la série de neuf, et la New-yorkaise PPOW exhibe des paysages cubains de Carrie Mae Weems. Concernant la vidéo, les galeristes Yvon Lambert et Chantal Crousel se sont associés pour créer « une salle de cinéma » où sont projetés des Hassan Khan à 3 000 €, Anri Sala à 26 500 €, Douglas Gordon et Alice Andersen. Parmi les installations et sculptures, difficile de rater la tente très colorée de Jorge Pardo chez le Berlinois Neugerriemschneider ou l’œuvre de Franz West chez Ghislaine Hussenot. En aluminium laqué rose de trois mètres de haut à la connotation phallique particulièrement poussée, elle intriguera certainement le public, qui dans le même registre, pourra s’amuser des sculptures de Paul McCarthy chez la Zurichoise Hauser & Wirth. Tradition de défricheurs oblige pour les Bâlois, de jeunes artistes disposent aussi de leur one man show dans la section Art Statements. Abstractions, images de jeux vidéos, installation à 360°, films, dessins animés, comics japonais et Actionnisme sont présents dans cette section qui, par le passé, a permis la consécration internationale d’artistes comme Pierre Huyghe ou Vanessa Beecroft.
A quelques pas du bâtiment principal, des conteneurs maritimes regroupant 20 jeunes galeries du monde entier ont été aménagés sur la plage. Enfin, à l’instar de la grande sœur bâloise, qui ne veut pas donner uniquement l’image d’une foire mercantile, mais flirte avec la connotation biennale et se veut découvreur de jeunes talents, une exposition de sculptures et de vidéos est proposée par le jeune commissaire américain James E. Rondeau, responsable du pavillon de son pays à la dernière Biennale de Venise. Sans oublier l’ouverture au public des collections privées de Martin Z. Marguelies, l’acquéreur à la précédente foire de Bâle de l’Hospice de Gilles Barbier et de la famille Rubell comprenant des Damien Hirst, Anselm Kiefer, Jeff Koons et Keith Haring...
Atteindre les grands collectionneurs latino-américains et consolider les relations avec leurs homologues américains, tels sont les buts de cette foire. Quant à savoir si elle concurrencera ou complètera Art Chicago et l’Armory Show, il est trop tôt pour le dire. Il est certain que des galeristes seront tenus à un moment de choisir parmi ces multiples manifestations. Mais comme le résume le galeriste new-yorkais Achim Moeller, « si la compétition existe, les affaires s’en portent mieux, par conséquent les collectionneurs et avant tout l’art ! ».

- MIAMI, Miami Beach Convention Center, 5-8 décembre.

Cet article a été publié dans L'ŒIL n°542 du 1 décembre 2002, avec le titre suivant : Art Basel

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