Sur les traces du Ve Dalaï-lama

Par Manou Farine · L'ŒIL

Le 1 janvier 2003 - 323 mots

Bien souvent les expositions relatant rituels et objets liturgiques d’une culture et d’un temps lointains affichent une orientation didactique et monocorde, au risque de provoquer chez le visiteur un coupable sentiment de déjà vu. Pour faire partager les visions secrètes du Ve Dalaï-lama, le Musée Guimet s’en est cette fois remis à une scénographie éloquente qui bien qu’un brin appuyée (bleus profonds allant crescendo sur le parcours, lumières explicites, extraits musicaux) illustre bien l’étroite dépendance tissée entre culture et religion tibétaine depuis l’achèvement de la conversion du pays au Bouddhisme. En 1642, le Ve dalaï-lama, dit le Grand cinquième (1617-1682), réalise l’unité du Tibet et établit l’Etat ecclésiastique bouddhique des dalaï-lamas. Celui qui céda ses pouvoirs en 1679 pour s’adonner à la contemplation mystique fut habile politicien, mais surtout homme d’une grande érudition, historien et écrivain religieux, auteur notamment du Manuscrit d’or, dont le texte principal relate les visions qu’eut le maître spirituel au cours de sa vertueuse existence. Il décrit les pratiques rituelles ésotériques consacrées aux divinités et s’accompagne d’illustrations montrées ici pour la première fois dans leur ensemble et figurant objets, dispositifs de cérémonie et remarquables mandalas. Aux côtés du manuscrit, les peintures noires (nagthang) évoquent de fantastiques créatures comme autant d’obstacles sur la voie de l’Eveil, avec une attention toute particulière accordée au traitement des détails et des fonds. Elles témoignent avant tout de l’originalité du Bouddhisme tibétain, combinant tradition bouddhique indienne et éléments locaux. En dépit de quelques énigmes chronologiques, la seconde partie de l’exposition s’avère passionnante et révèle objets et mobiliers de culte issus de collections particulières. Les cérémonies et dispositifs évoqués dans les peintures des salles trouvent ici leur pendant tangible. Couperets, chaudrons, coupes et dagues rituelles rendent compte de la singulière virtuosité des orfèvres en même temps que de l’extraordinaire complexité et variété du panthéon tibétain auquel ces objets sont dédiés.

PARIS, Musée Guimet, 6, place d’Iena, tél. 01 56 52 53 00, 6 novembre-24 février.

Cet article a été publié dans L'ŒIL n°543 du 1 janvier 2003, avec le titre suivant : Sur les traces du Ve Dalaï-lama

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