Philippe de Champaigne

Par Adrien Goetz · L'ŒIL

Le 1 janvier 2003 - 356 mots

Ecrire aujourd’hui sur Philippe de Champaigne, après les grands livres de Bernard Dorival, qui publia en 1976 le catalogue raisonné de l’artiste (Laget) et la synthèse de Louis Marin (Philippe de Champaigne, Hazan, 1995), pouvait sembler audacieux. Pour le quatrième centenaire de la naissance de l’artiste, Lorenzo Pericolo, maître de conférences d’histoire de l’art à l’Université de Rennes, démontre brillamment qu’aux audacieux la fortune sourit toujours. Non seulement son livre exhume bon nombre de toiles inédites ou jamais reproduites en couleurs nulle part, mais sa vision de l’artiste, fondée sur ce corpus qu’il rend enfin intégralement accessible, en sort renouvelée et enrichie. Non, Philippe de Champaigne n’est pas seulement le génial peintre de Port-Royal et du combat janséniste. En affinant la chronologie, Pericolo revient sur les années de formation et le rapport à la tradition flamande, il analyse en profondeur le grand chantier mené pour Anne d’Autriche au Luxembourg dans les années 1626-1631, insiste sur un Champaigne paysagiste, toujours oublié et pourtant aussi passionnant que Poussin. Port-Royal, à partir de 1643, se comprend comme une étape dans l’évolution d’un artiste en quête d’une spiritualité toujours plus haute. Certaines analyses d’œuvres sont d’extraordinaires morceaux de bravoure, comme le commentaire de La Vision de Sainte Julienne (Birmingham, The Barber Institute of Fine Arts), tableau aussi beau et complexe que le célèbre Ex-Voto de 1662 du Louvre. Champaigne redevient, à part entière, un peintre – et plus seulement un illustrateur intellectuel, qui n’aurait eu pour seul génie que de donner, en images, un équivalent aux Pensées de Pascal ou aux textes philosophiques et théologiques de ces Messieurs de Port-Royal.
Le Champaigne de Pericolo aime le dessin et la couleur, les idées certes, mais aussi la chair, la nature et le plaisir de peindre. Autre qualité de ce livre : la place faite à la gravure, indispensable pour comprendre l’art de l’époque. Pour son anniversaire, peu fêté en France, Champaigne, grâce à l’enthousiasme d’un historien de l’art formé à Pise associé à un éditeur de Tournai, semble rendu à la vie.

Lorenzo Pericolo, Philippe de Champaigne, éd. La Renaissance du Livre-Dexia, collection « Références », 2002, 320 p., 74,50 euros.

Cet article a été publié dans L'ŒIL n°543 du 1 janvier 2003, avec le titre suivant : Philippe de Champaigne

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