Soutine trop à l’étroit à la Pinacothèque

Par Philippe Piguet · L'ŒIL

Le 20 décembre 2007 - 373 mots

Après trente-cinq ans d’absence, Chaïm Soutine est enfin de retour à Paris, où la jeune pinacothèque lui a réservé ses cimaises pour une rétrospective qui alterne surprises et déceptions.

Aujourd’hui que la critique a révisé ses jugements, l’œuvre de Chaïm Soutine, né en 1893 à Smilovitchi, près de Minsk, en Biélorussie, décédé en 1943 à Paris, est considérée comme l’une des plus fortes de l’histoire de l’expressionnisme. Parce qu’elle reste toutefois encore peu connue, l’exposition que lui consacre la pinacothèque de Paris est une occasion à signaler, d’autant qu’elle rassemble une centaine de tableaux qui couvrent les trente ans de création du peintre offrant à voir un panorama assez complet de la palette de l’artiste, tous genres et manières confondus.

Absence de chefs-d’œuvre...
Natures mortes, portraits, paysages, Soutine n’a cessé de décliner les motifs au gré des aléas d’une vie en dents de scie, avec ses à-coups faits d’enthousiasme et de désespoir, de coups de foudre et d’ennuis de santé. Rarement une œuvre ne fut autant à l’unisson d’une vie. Les œuvres de Soutine sont à l’image de l’aventure du juif émigré qu’il est et « sur qui pèsent tous les interdits d’une religion trop contraignante », comme le note Marc Restellini, le commissaire de l’exposition. À ceci près toutefois que l’artiste a su les transgresser tout en les respectant en faisant une peinture résolument éloignée du réel, forte d’une vision quasi hallucinée.
Quelque chose d’un chaos universel est à l’œuvre dans l’art de Soutine qui lui confère une force expressive totalement inédite. La liberté de sa touche préfigure celle d’une peinture expressionniste telle qu’elle a été développée tant par la peinture américaine que par certains artistes figuratifs de l’après-guerre. La même urgence panique anime l’œuvre de Soutine et de Willem de Kooning, la même figuration défigurée caractérise le style de Soutine et celui du Dubuffet des années 1940.
Issues pour l’essentiel de collections particulières, les œuvres qui sont réunies à la Pinacothèque de Paris sont, hélas ! assez souvent secondaires. Du fait que les locaux s’enfoncent dans le sous-sol en un parcours labyrinthique étroit et bas de plafond et que ni la scénographie aux cimaises colorées, ni l’accrochage ne l’allègent, force est de regretter qu’une exposition comme celle-là n’ait pas été plus soignée muséographiquement  !

Cet article a été publié dans L'ŒIL n°598 du 1 janvier 2008, avec le titre suivant : Soutine trop à l’étroit à la Pinacothèque

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