Hartung : l’œuvre tardive

Par Manou Farine · L'ŒIL

Le 1 mars 2003 - 325 mots

Seconde école de Paris, abstraction lyrique, tachisme, art informel ou expressionnisme abstrait, autant d’appartenances, pour certaines bien vagues, qui auront entrepris de rattacher le long parcours d’Hartung à l’histoire de l’art du XXe siècle. Sans que jamais la profonde cohérence et l’indépendance tranquille du peintre n’en soient dérangées. L’œuvre trouve bien sûr son plus constant champ d’intervention dans l’abstraction, mais maintient en filigrane une singularité placée sous le signe de l’expérimentation constante et d’une peinture à la conquête d’elle-même et de ses propres limites. Le musée d’Art moderne et contemporain de Strasbourg a choisi de s’arrêter sur les dernières peintures exécutées dans les années 1980. Succincte, mais étayée par une documentation fournie, l’exposition réunit des toiles prêtées par la fondation Hartung à Antibes. Elle rend compte d’une période au cours de laquelle Hartung, désormais invalide mais nourrissant toujours la même quête du mouvement, du rythme et du geste, remet une dernière fois en question son parcours. L’autodidacte qui, dans le sillage de Kandinsky, privilégiait dès les années 1920 l’impulsivité du geste, continue de l’enregistrer à même la toile. Il bat, pulvérise, projette, frotte, alternant les outils (stylets, râteaux, feuilles, rouleaux, pistolets...) et les matériaux. Peindre dans l’urgence, projeter un dynamisme subjectif et violent, telles sont les modalités d’intervention du peintre. Dans les années 1980, elles se doublent d’une réflexion sur l’espace et la couleur. Les formats prennent de l’ampleur, les formes souples et les traits rapides aussi. Alors qu’il renouvelle son mode opératoire, les outils manipulés gagnent en sophistication. Ils peuvent dès lors nuancer avec précision la densité des projections/pulvérisations effectuées sur la toile. Au moyen de pistolets à peinture, ou de sulfateuse à vigne, dont il varie les embouts, Hartung parvient en quelque sorte à discipliner la matière, corrigeant par là l’interprétation commune d’une peinture improvisée, facile, livrée au seul geste souverain et aléatoire.

STRASBOURG, musée d’Art moderne et contemporain, 1 place Hans Jean Arp, tél. 03 88 23 31 31, 11 février-11 mai.

Cet article a été publié dans L'ŒIL n°545 du 1 mars 2003, avec le titre suivant : Hartung : l’œuvre tardive

Tous les articles dans Expositions

Le Journal des Arts.fr

Inscription newsletter

Recevez quotidiennement l'essentiel de l'actualité de l'art et de son marché.

En kiosque