Du beau, du bon... du Pinault

Par Roxana Azimi · L'ŒIL

Le 4 décembre 2007 - 382 mots

On n’osait plus en rêver ! Avec « Passage du temps », orchestrée par Caroline Bourgeois au Tri Postal de Lille, voilà enfin une exposition digne de ce nom de la collection François Pinault, sous le prisme de la vidéo et de la photo. Une fois n’est pas coutume, la liste des artistes ne ressemble pas à un catalogue d’une vente du soir chez Christie’s.
L’entrée en matière est fulgurante, moins par le long corridor lumineux de Dan Flavin que par l’installation The Object of It all de Vito Acconci. Rien d’éblouissant visuellement. Il faut se perdre dans le dédale des cubes noirs, tendre l’oreille pour entendre une leçon qui vire à la cacophonie.
La suite du programme régale le spectateur, non pas tant par le bréviaire des Usual Suspects comme Bill Viola, Pierre Huyghe et Douglas Gordon, dont les pièces présentées sont certes magistrales, que par les noms qu’il n’aurait guère soupçonnés dans la collection Pinault. Le choix fait la part belle au grotesque, à la fragilité, ou à la noirceur. C’est une vision chaotique et absurde du travail que présente le Bureau augmenté de Michel François, une installation où se heurtent ordinateurs, journaux et téléphones. Le burlesque pointe dans la vidéo Organic Escalator d’Aernout Mik. Les gens se bousculent dans un escalator alors qu’en arrière-plan, sont projetées les images d’un immeuble en carton-pâte sur le point de s’écrouler. Tout est surjoué comme dans un film de série B, au point que l’on pouffe de rire. Sauf que, dans le même temps, les murs du box où se trouve la vidéo bougent subrepticement, créant chez le visiteur un malaise et un vertige dont il ne saisit pas immédiatement la raison.
Avec Anchorage de Shirin Neshat, la tension vient de la voix, passant d’une prière monocorde à une mélopée fredonnée pendant que l’artiste tournoie comme un derviche. On y lit une métaphore d’une société iranienne où le religieux l’a emporté sur la mystique. Bien rythmée, l’exposition surprend toutefois par la récurrence de la vidéo Happiness in Mitte (2003) d’Adel Abdessemed, montrant différents chats lapant du lait. Une ponctuation qui étonne d’autant plus qu’est présentée une pièce similaire de 2001 de Fischli & Weiss.

« Passage du temps, collection François Pinault », Le Tri Postal, avenue Willy-Brandt, Lille (59), www.lille3000.com, jusqu’au 1er janvier 2008.

Cet article a été publié dans L'ŒIL n°597 du 1 décembre 2007, avec le titre suivant : Du beau, du bon... du Pinault

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