Lucian Freud

Ce que le peintre voit

Par Manou Farine · L'ŒIL

Le 2 novembre 2007 - 334 mots

S’il n’en reste qu’un, combattant du réalisme tout en chairs franches et traits crus, ce sera celui-là : Lucian Freud, quatre-vingt-cinq ans, petit-fils de, fringante vedette d’une peinture britannique aussi obstinée qu’établie. Il y a deux ans déjà, son exposition vénitienne causait un peu de raffut et beaucoup d’afflux et venait crânement affronter la sélection de la Biennale. Le Louisiana Museum lui offre à son tour une large rétrospective chapeautée par Catherine Lampert, amie du peintre et ex-tête chercheuse de la Whitechapel Art Gallery à Londres.
Au programme : pas moins de soixante peintures couvrant soixante années d’un parcours d’une limpide cohérence. C’est dans les années 1940 que le jeune Freud à la biographie que l’on sait, et fraîchement naturalisé britannique, entre en peinture. Nus et portraits déjà, peints avec application et bienveillance. Bientôt Freud trouve son régime pictural. Il peint debout, d’après modèle, mais cherche désormais à poser sur sa toile vie et intensité du modèle plutôt que représentation fidèle.
« Je peins ce que je vois, justifie Freud. Et non pas ce que vous espéreriez que je vois. » Message reçu. Ocres, blancs, brun pâle sous une lumière froide accueillent invariablement les chairs lourdes et roses, les visages aux traits trop humains. Place au style, qui connaîtra cependant quelques variations. La plus notable a sans doute trait à la touche, que Freud va épaissir largement.
Des débuts à la manière sèche, anguleuse et froide aux portraits les plus récents, la matière se fait croûteuse, accidentée, taillée, reprise par une touche plus longue et consistante. Les formats s’allongent, les poses se sophistiquent, ne dédaignant pas quelques provocations dans la composition comme dans le traitement flasque et sillonné des corps, les références se multiplient – au point qu’on s’y perd un peu. Et le peintre en mondain avisé se plaît à répondre aux commandes, croquant même durement la reine Elisabeth en 2001.

« Lucian Freud, penetrating observations », Louisiana Museum of Modern Art, GL Strandvej 13, 3050 Humlebæk (Danemark), tél. 00 45 49 119 07 19, www.louisiana.dk, jusqu’au 27 janvier 2008.

Cet article a été publié dans L'ŒIL n°596 du 1 novembre 2007, avec le titre suivant : Lucian Freud

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