Carte blanche à...

Lionel Guibout

La voile – étude pour Méduse, mars 2004, encre de chine, aquarelle et pigments sur papier.

Par Philippe Piguet · L'ŒIL

Le 1 mai 2004 - 311 mots

Quelque chose d’une rage impatiente est à l’œuvre dans le dessin de Lionel Guibout qui lui confère une énergie et une tension peu communes. Il a beau avoir intitulé – comme nonchalamment – l’une de ses dernières publications Fusains faisant, sa main s’empare du champ de la feuille pour y faire apparaître de monumentales et puissantes figures de gigantomachie au modelé digne des Carrache. Ailleurs, c’est son trait emporté, quasi furieux, qui mêle en surface un monde étrange, voire inquiétant, de formes animales et humaines. À Berlin, en 1997-1998, il a passé quelque trente-six journées devant la frise en haut-relief de marbre du grand autel de Pergame représentant le combat légendaire des Dieux et des Géants, carnet à dessin et crayon en main pour tenter d’en saisir la sublime fulgurance. Lionel Guibout a le goût de l’histoire. D’un fait à l’autre, du divin à l’humain, se saisissant de récits inscrits au patrimoine culturel universel, il lui plaît d’en tutoyer les héros. Non pour se donner des ailes de géant mais pour instruire le domaine de l’art contemporain d’une dimension narrative épique. Si, versant olympique, Eurynomé, Cottos, Gygès et Briarée comptent parmi quelques-uns des héros qu’il a fréquentés, comment aurait-il pu ne pas être retenu par ceux de ses semblables qui ont partagé le drame du naufrage de la Méduse ? De la tragique histoire de leur radeau, Guibout a imaginé une étonnante saga graphique à laquelle Michel Tournier a répliqué par toute une série d’aphorismes poétiques. Cette carte blanche qui en est une nouvelle expression rejoint ainsi l’imposant et mémorable ensemble de peintures et dessins que l’artiste a décliné sur ce thème ces trois dernières années et qu’il présente en Allemagne.

« Lionel Guibout – Le Radeau sans fin », FREIBURG IM BREISGAU (Allemagne), Morat-Institut für Kunst und Kunstwissenschaft, Lörracher Str. 31, tél. 00 49 761 476 59 16, 27 mai-31 juillet.

Cet article a été publié dans L'ŒIL n°558 du 1 mai 2004, avec le titre suivant : Lionel Guibout

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