Singulier Fred Deux

L'ŒIL

Le 1 mai 2004 - 349 mots

Fred Deux (né en 1924), qui combattit l’occupant durant la Seconde Guerre mondiale dit « n’avoir jamais quitté le maquis ». Toujours en marge et en résistance, dans la solitude de l’atelier. Autodidacte, ancien ouvrier, militaire, employé de librairie, reconverti presque malgré lui en un des créateurs les plus singuliers de l’époque contemporaine, Fred Deux connaît avec cette double exposition rétrospective au cabinet d’art graphique de Beaubourg et à la galerie Margaron, une consécration toute légitime. La carrière de Fred Deux ne peut pas se résumer en quelques mots, tant elle est riche en rencontres et en soubresauts du destin. Mais par-delà les aléas d’une vie, demeure simplement cet artiste « passeur » qui « libère une vision », comme l’écrit joliment Pierre Wat. Depuis plus d’un demi-siècle, Fred Deux dessine avec une rigueur de la ligne qui n’a d’égale que la liberté de composition qu’il s’octroie. Ce qui frappe le plus le spectateur, c’est cette distance vertigineuse entre
ce trait d’une rare précision et le caractère indécis des figures qu’il trace. Ce sont donc bien « visions », à l’accoutumée insaisissables, qui semblent avoir jailli sur le papier et s’y être figées. La filiation avec Jérôme Bosch paraît dès lors évidente. Son Objet fascinant ou son sublime Je feu en sont des illustrations patentes.
On aurait grandement tort de ne voir chez Fred Deux qu’une dimension morbide, maladive.
Ses séries de Sperme, sa Sainte Vulve, sa Régénération montrent bien que son esthétique, où l’obsession organique se mêle à une puissante spiritualité, est d’abord une énergie, une électricité stimulante. Fred Deux, qui a beaucoup écrit et publié, note, avec un ton presque romantique, « il y a des dessins qui surgissent comme des orages ». On serait tenté de prolonger la métaphore en ajoutant qu’ils foudroient le regard comme des éclairs.

PARIS, « Fred Deux, l’alter ego », cabinet d’art graphique du Centre Pompidou, 19 rue Beaubourg, IIIe, tel. 01 44 78 12 33, 10 avril-14 juin ; « Exposition Fred Deux », galerie Alain Margaron, 5 rue du Perche, IIIe, tel. 01 42 74 20 52, 22 avril-3 juillet.

Cet article a été publié dans L'ŒIL n°558 du 1 mai 2004, avec le titre suivant : Singulier Fred Deux

Tous les articles dans Expositions

Le Journal des Arts.fr

Inscription newsletter

Recevez quotidiennement l'essentiel de l'actualité de l'art et de son marché.

En kiosque