Art Basel, incontournable

Par Roxana Azimi · L'ŒIL

Le 1 juin 2004 - 727 mots

Professionnalisme des organisateurs, logistique imparable et exposants prestigieux : voici le cocktail qui depuis trente-cinq ans attire des bataillons de collectionneurs dans la bourgade helvétique.

La foire Art Basel est l’une des rares à siéger en majesté dans le peloton des salons. « Le succès de Bâle tient à la personnalité de Samuel Keller. Il va voir tous les collectionneurs privés un à un pour les convaincre de se déplacer. Automatiquement, quand on réussit à faire venir les collectionneurs, les galeries se déplacent », souligne la galeriste Anne de Villepoix. Des galeries triées sur le volet, puisque sur 850 candidatures, Art Basel n’en sélectionne que 270, soit près du quart. « Même si on est une bonne galerie, et qu’on est à Bâle depuis des années, on peut être rejeté l’année suivante. Il faut toujours faire ses preuves », précise le courtier Philippe Ségalot. Continuellement aux aguets, les galeries savent que pour résister à l’épreuve du feu, elles se doivent de montrer des œuvres fraîches sur le marché et non pas les nanars traînés de foires en salons. Parmi les nouvelles recrues ayant résisté au tamis de la sélection, on relève plusieurs spécialistes de photos comme Michael Hoppen et Ubu Gallery, et dans la section de l’art contemporain, la New-Yorkaise Tanya Bonakdar et la Polonaise Foksal Gallery Foundation.
Le succès de Bâle tient aussi à sa capacité d’innovation continue. Cette année, Art Basel initie une journée professionnelle réservée aux musées, marchands et collectionneurs, mais qui aura lieu le jour de clôture. On s’étonne que cette journée ne soit pas organisée au début de la manifestation, tant les stands sont pris d’assaut dès les premières heures. « Le dernier jour de la foire est toujours mou […], rappelle Florence Bonnefous, codirectrice de la galerie Air de Paris. L’an dernier, la direction a fait un audit auprès des exposants pour savoir s’il fallait conserver le dernier lundi ou raccourcir la foire sur le week-end. Une majorité a préféré le maintenir. Du coup la nouvelle formule doit insuffler des événements spéciaux pour animer cette journée. »
L’effort cette année est aussi pédagogique. La nouvelle section « Art Lobby » permet de rencontrer artistes, critiques et collectionneurs dans un esprit proche de l’agora. Cet esprit de médiation se retrouve aussi avec le contact hour instauré dans la section « Art Unlimited » où un représentant de chaque galerie doit répondre à des questions. Pour ne pas effaroucher les jeunes collectionneurs, la foire préserve l’opération « point jaune » signalant au public les œuvres inférieures à 5 000 euros – de plus en plus rares. Étant donné qu’un jeune artiste, du moins américain, s’échange rarement à moins de 10 000 euros, l’amateur en herbe se rabat à ce prix surtout sur des œuvres sur papier.
Les galeries françaises sont au nombre de vingt-deux, soit la troisième plus forte présence européenne après la Suisse et l’Allemagne. Cette année, on regrettera toutefois l’absence de Michel Durand-Dessert, exclu après trente ans de présence fidèle. La galerie Georges-Philippe et Nathalie Vallois, qui avait fait fureur en 2002 avec l’installation de Gilles Barbier sitôt vendue au collectionneur américain Martin Margulies, est encore persona non grata. Tout comme Nathalie Obadia et Ghislaine Hussenot. Malgré le professionnalisme de la foire, les règlements de compte n’en sont pas absents. En revanche, on compte l’arrivée d’Almine Rech et d’Emmanuel Perrotin. La présence de ce dernier n’avait d’ailleurs que trop tardé. « Ne pas faire Bâle à mon niveau, c’était un manque à gagner colossal en terme d’image, peut-être pas en terme de chiffre d’affaires. D’ailleurs beaucoup d’artistes vous donnent des pièces parce que vous faites Bâle… », rappelle-t-il. Pour sortir du lot, le galeriste a fait appel à Thierry Dreyfus, maître d’œuvre des défilés de Dior Homme, pour aménager et éclairer son stand. On y verra notamment une sculpture Nuage de Murakami et plusieurs réalisations en verre de Jean-Michel Othoniel. Les Français Praz-Delavallade et Jousse Entreprise siègent quant à eux dans la section « Art Statements », secteur d’accès à la fois plus facile et difficile car le choix est dicté par le projet de l’artiste et non la qualité de la galerie. Pendant que Bruno Delavallade présente le travail de Valentin Carron, Philippe Jousse s’attache à Aleksandra Mir. On verra donc son Big Umbrella, parapluie d’un format trois fois supérieur à la taille normale.

Art Basel, BÂLE, Messeplatz, 16-21 juin, www.art.ch

Cet article a été publié dans L'ŒIL n°559 du 1 juin 2004, avec le titre suivant : Art Basel, incontournable

Tous les articles dans Marché

Le Journal des Arts.fr

Inscription newsletter

Recevez quotidiennement l'essentiel de l'actualité de l'art et de son marché.

En kiosque