Carte blanche à...

Jacques Pourcher

« Riverrun », 2004, gouache sur papier.

Par Philippe Piguet · L'ŒIL

Le 1 novembre 2004 - 348 mots

Lux Aeterna de Ligeti, Patterns in a chromatic Field de Morton Feldman, Four Walls de John Cage, mais aussi le jardin du Ryoan-Ji ou le mémorial Brion de l’architecte Scarpa, Jacques Pourcher puise son inspiration à la source de modèles dont l’exigence formelle égale la quête de quelque chose d’essentiel. À la surface de papiers de moyen format, l’artiste qui est fou de musique, de couleur et de rythme, tente d’y faire écho dans la fluidité de la gouache en un jeu libre et rigoureux de lignes et de ponctuations délicates. Un travail d’une longue patience qu’il exécute dans le silence replié de son atelier, à l’écart de toutes les turbulences du monde et de tous les qu’en-dira-t-on. Non qu’il adopte une attitude misanthrope mais Pourcher considère que la création – la sienne, du moins – exige qu’on se donne pleinement à elle, donc qu’on ne se disperse pas. Aux jeux trop souvent vains de la communication, il préfère de beaucoup celui de l’échange. Son œuvre, exclusivement graphique, cultive toutes les subtilités d’une esthétique du peu et réclame de ceux qui s’y arrêtent de lui offrir leur temps. En réponse à une commande que lui a passée un privé, passionné de bibliophilie choisie, Jacques Pourcher s’est récemment mis à l’œuvre de l’illustration de certaines séquences de Finnegans Wake, le célèbre roman de James Joyce. Entamé en 1923 sous le titre Work in progress (Travail en cours), paru seize ans plus tard, l’ouvrage de l’Irlandais est à considérer comme un prodigieux poème. Dans le flux de son travail, l’artiste a réalisé cette carte blanche dont les méandres sous-jacents, évocation du pays de Joyce, s’informent en ondes de choc répétitives à l’instar de la structure en boucle du texte de référence. Intitulée Riverrun, elle renvoie à l’œuvre au même titre du compositeur japonais Toru Takemitsu, créée à Los Angeles en 1985 et directement inspirée par Finnegans Wake. Texte, musique et dessin sont ici associés pour dire le mouvement de la vie.

Jacques Pourcher est représenté par la galerie Nouvellet, 19 rue de Seine, Paris VIe, tél. 01 43 29 43 15.

Cet article a été publié dans L'ŒIL n°563 du 1 novembre 2004, avec le titre suivant : Jacques Pourcher

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