Photographie

Lee Miller... La guerre d’une étoile

Par Fabien Simode · L'ŒIL

Le 27 septembre 2007 - 490 mots

Tandis que le Mexique célèbre le centenaire de la naissance de Frida Kahlo, la Grande-Bretagne fête en son sacro-saint V&A le centenaire d’une autre icône du féminisme : Lee Miller. Une gageure...

Par quelle mouche Mark Haworth-Booth, le commissaire de l’exposition londonienne, a-t-il donc été piqué ? D’aucuns pensaient la chose impossible : saisir « l’art de Lee Miller » paraissait au mieux une gageure, au pire de l’arrogance tant la production de la photographe est protéiforme. Un jour devant l’objectif, elle passe le lendemain derrière l’œilleton du Rolleiflex ; hier surréaliste, elle n’hésite pas à plonger des deux pieds dans la réalité pour suivre la libération de l’Europe.

Photographe et rédactrice, épouse aimante et libre, aventurière et femme d’intérieur... Lee Miller est tout cela à la fois, une femme complexe dont la plus grande œuvre est sa vie. Ceci, le V&A l’a d’ailleurs compris, qui aborde sa rétrospective comme une gigantesque biographie.

Elle « invente » la solarisation
Née à Poughkeepsie aux États-Unis le 23 avril 1907, Elizabeth Miller débute sa carrière à New York comme mannequin. Encouragée par Steichen, elle débarque à Paris en 1929 et frappe à la porte de Man Ray. Séduit par son culot et sa beauté, celui-ci l’accepte dans son atelier. Muse, puis très vite maîtresse du maître, la jeune Américaine accouche avec lui d’une petite révolution surréaliste : le procédé de la solarisation. Mais l’oiseau ne se laisse pas facilement mettre en cage. En 1930, Lee tourne dans Le Sang d’un poète de Cocteau, l’ennemi juré des surréalistes, puis, deux ans plus tard, s’en retourne à New York où elle ouvre son propre studio photo.

Mariée à un riche Égyptien, elle s’installe au Caire en 1934. Mais photographier l’ombre des pyramides ne l’amuse qu’un temps, jusqu’en 1937 quand, de retour en France, elle rencontre Roland Penrose chez les Rochas. Max Ernst joue les cupidons ; il n’imagine alors pas que, quarante ans plus tard, en 1977, Lee s’éteindrait d’un cancer dans les bras de l’artiste britannique.

En 1939, la guerre éclate. Sous le blitz londonien, Lee rempile pour sauver Vogue. Correspondante de guerre dès 1942, elle débarque en Normandie six jours après le D-day. Elle couvre la destruction de Saint-Malo, la libération de Paris et celle du camp de Dachau. Un cliché de Scherman montre cette seule femme accréditée dans les zones de combat prenant un bain dans l’appartement d’Hitler. Dès lors, rien ne sera plus comme avant. Dépressive, aimant l’alcool, un ami médecin lui aurait dit entre deux portraits d’artistes : « Le monde ne peut tout de même pas rester en guerre pour vous procurer des émotions. » C’est heureux. 

Autour de l’exposition

Informations pratiques « The Art of Lee Miller », jusqu’au 6 janvier 2008. Commissaire : Mark Haworth-Booth.
Victoria and Albert Museum, Cromwell Road, London.
Métro: South Kensington. Ouvert tous les jours de 10 h à 17 h 45 sauf vendredi de 10 h à 22 h. Tarifs : 6 € et 4 €. Tél. 00 44 20 7942 2000, www.vam.ac.uk

Thématiques

Cet article a été publié dans L'ŒIL n°595 du 1 octobre 2007, avec le titre suivant : Lee Miller...

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