Art moderne - Cinéma - Danse & Théâtre

L’autre Dalí

Par Guillaume Morel · L'ŒIL

Le 1 mai 2005 - 542 mots

Spectaculaire et foisonnante, l’exposition « Tout Dalí­ » se penche sur les liens entretenus par l’artiste avec le cinéma, le théâtre, la publicité ou la mode. En près de quatre cents œuvres, souvent rares ou inédites.

Intitulée « Tout Dalí », l’exposition proposée à Rotterdam n’est pourtant pas une rétrospective, et la peinture n’y occupe pas la première place. C’est un autre Dalí qui est ici montré, celui qui a mis son génie au service de la culture de masse sous ses différents aspects, le cinéma et le théâtre, le design, la mode, la publicité...
Organisée selon les disciplines, l’exposition s’ouvre et se referme avec le cinéma. D’emblée, un écran géant projette la scène du rêve de Spellbound d’Alfred Hitchcock (1945), pour laquelle Dalí a réalisé les décors. Des esquisses, des dessins et des photographies de tournage viennent en documenter la conception. C’est sans doute la plus célèbre de ses expériences cinématographiques. Il y en a d’autres. Avec Luis Buñuel – Un chien andalou et L’Âge d’or –, les Marx Brothers ou Walt Disney. Ce dernier propose en 1941 à Dalí de participer à un dessin animé intitulé Destino, un projet qu’ils laisseront inachevé avec seulement quinze secondes de film réalisées. À partir des nombreux documents préparatoires existants – dessins, huiles, story-boards présentés ici – et de ces précieuses secondes d’origine, le film a pu être monté il y a deux ans. D’une durée de six minutes, projeté en fin d’exposition, Destino est une vraie curiosité, mêlant le style Disney à l’univers fantastique de Dalí.
L’artiste espagnol a touché à tout, avec la même créativité délirante, qu’il s’agisse de peinture personnelle ou d’activités commerciales comme la publicité. On revoit d’ailleurs avec plaisir quelques-uns de ses spots, notamment ceux pour Alka Seltzer (1974) ou le chocolat Lanvin (1970) dont la saveur fait dresser les moustaches de l’artiste. En parcourant l’immense espace d’exposition, le visiteur découvre tour à tour le goût de Dalí pour le théâtre – livret, décors et costumes pour Tristan fou –, des photographies de Man Ray, Cecil Beaton, Brassaï ou Philippe Halsman (la série Dalí Atomicus, inspirée du tableau Léda Atomica de 1948), mais aussi des pochettes de disques, des bouteilles de parfums, des couvertures de magazines ou le célèbre sofa en forme de lèvres de Mae West (1937)...
L’exposition fait également revivre ce que Dalí avait imaginé pour l’Exposition universelle de 1939, une sorte d’attraction foraine surréaliste intitulée Le Rêve de Vénus, à l’aide d’un film amateur d’époque, de photographies d’Éric Schaal et d’une monumentale huile sur toile prêtée par le Prefectural Art Museum d’Hiroshima. La mode n’est pas en reste, Dalí ayant collaboré avec les plus grands, Christian Dior ou Elsa Schiaparelli. Les robes réalisées sont exposées aux côtés d’œuvres préparatoires, parmi lesquelles de magnifiques aquarelles pour les modèles Dancing flowers et Ailles Brisses, peintes dans les années 1940. Dans la mode comme dans sa peinture, l’imagination, l’érotisme, les métamorphoses les plus surréalistes jouent un rôle fondamental (le chapeau-chaussure). Remarquable tant par son contenu que par sa présentation, cette exposition est l’une des plus complètes organisées sur Dalí. Foisonnante et vivante, elle correspond pleinement à l’esprit de son œuvre protéiforme.

« Tout Dalí­ », ROTTERDAM (Pays-Bas), Museum Boijmans Van Beuningen, 18-20 Museumpark, tél. 31 0 10 44 19 400, www.boijmans.nl, 5 mars-12 juin, cat. 498 p., 29,5 euros.

Cet article a été publié dans L'ŒIL n°569 du 1 mai 2005, avec le titre suivant : L’autre Dali

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