Art contemporain

Hugues Reip : relâchements d’images

Par Manou Farine · L'ŒIL

Le 1 juin 2005 - 291 mots

Soit une bobine de papier blanc, longue de trois cents mètres et haute de deux mètres, recouvrant les murs et adoptant tant bien que mal la surface d’architecture voûtée toute en alcôves et en pénombre du Frac Limousin. Ainsi Hugues Reip intercepte-t-il l’espace d’exposition pour y inscrire une énergique monographie.

Rien d’étonnant à ce que ce rouleau, cette pellicule filmique, cette longue page blanche fasse ici office d’écran et d’écrin rythmant l’exercice cumulatif de la rétrospective. Vidéos, projections,
rétroprojections, sculptures de carton et de papier, machineries, suspensions, dessins, gribouillis et découpages s’y glissent comme autant d’impacts séquentiels, comme autant d’arrêts sur image combinés en une même envie de faire et de défaire et resserrés par quelques renvois décontractés à Duchamp, Buster Keaton, aux pionniers du cinéma d’animation ou aux assemblages et sculptures architecturaux constructivistes. X-Man, petit personnage figé – électrocuté – dans sa marche et vivement griffonné au néon blanc, Sculpture de voyage de Duchamp réactivée pour l’occasion, rétroprojection machinée et chorégraphiée de fantômes cartonnés fixés sur un plateau rotatif ou encore Toon bariolé et attachant, véritable explosion de surfaces agglutinées en un volume biomorphique, les pièces alignées dans les travées de l’ancienne tonnellerie débordent d’énergie. Reip y enveloppe son vocabulaire fluide, sa grammaire lucide et débrouillarde, à peine plus désinvolte que nécessaire, un brin moins insouciante qu’il ne le laisse supposer, oscillant entre attitudes et plasticité, spectacles obsolètes et réflexion esthétique gonflée d’images, automatisme et abstraction, lorgnant là vers un inattaquable geste graphique, ici vers une réflexion esthétique gonflée d’images, là-bas sur le corps de l’image et le temps de sa projection. Une image teintée d’un désenchantement qui ne s’interdit aucune jubilation.

« Hugues Reip », LIMOGES (87), Frac Limousin, 2 impasse Charentes, tél. 05 55 77 08 98, jusqu’au 25 juin.

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Cet article a été publié dans L'ŒIL n°570 du 1 juin 2005, avec le titre suivant : Hugues Reip : relâchements d’images

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