Les frères Beggarstaffs, Klimt, Penfield... En matière d’affiches, chaque nation possède son champion

Par Anouchka Roggeman · L'ŒIL

Le 28 août 2007 - 411 mots

Les frères Beggarstaffs sont à l’affiche anglaise ce que Toulouse-Lautrec est à l’affiche française. Alors que dans les années 1890 les affiches anglaises étaient généralement très colorées et illustrées de multiples scènes, l’affiche réalisée en 1894 par les frères Beggarstaffs (qui n’avaient en fait aucun lien de parenté) pour la pièce de théâtre Hamlet dénote.
Représentant une silhouette d’homme vêtu d’une cape noire et tenant une tête de mort entre ses mains, l’œuvre est non seulement en noir et blanc sur papier kraft, mais elle est aussi marquée par un style très synthétique, austère, influencé par l’art japonais.
Refusée à plusieurs reprises par le directeur du théâtre qui lui reprochait son aspect trop classique, l’affiche ne fut jamais imprimée : il n’existe aujourd’hui qu’une vingtaine d’exemplaires de cette œuvre « prototype » qui fut réalisée au pochoir par les artistes eux-mêmes.

Le graphisme audacieux de l’Autrichien Klimt
Très originale aussi, la lithographie couleur de Gustav Klimt (1862-1918) réalisée en 1898 pour l’affiche de la première exposition de la Sécession viennoise est un véritable chef-d’œuvre. Elle représente le combat entre Thésée et le Minotaure, sous le regard de la déesse grecque Athéna. Au centre de l’affiche, une partie disproportionnée reste vide.
Pour la première fois, une partie vierge n’est pas destinée à recevoir un texte, mais fait partie intégrante du graphisme de l’œuvre. Dans la première version de l’affiche, les troncs d’arbres, qui cachent un aspect du corps du héros grec, n’apparaissent pas. Rappelant les katagami japonais, des pochoirs d’impression réalisés avec des cheveux, ces deux troncs d’arbre ont été ajoutés par l’artiste dans sa deuxième version en réponse aux critiques sur la nudité de Thésée.

Penfield, le précurseur du « style » américain
Marquant aussi son époque, l’Américain Edward Penfield (1866-1925) fut l’un des plus grands artistes de l’affiche illustrée de la fin du XIXe siècle. Sa notoriété fut établie lorsque le directeur de la revue Harper’s lui demanda de réaliser chaque mois une affiche pour cette célèbre revue, dont la couverture était illustrée par le Français Grasset (un exemplaire est présenté dans l’exposition).
Alors que les affiches américaines étaient jusque là plutôt rudimentaires, immenses et essentiellement typographiques ou illustrées de gravures sur bois, Edward Penfield innova en dressant un portrait sympathique et optimiste de la société américaine. Son style, marqué par des grands aplats de couleur sans relief, des contours précis et raffinés, des couleurs acidulées et une signature en forme de monogramme, à la façon des sceaux familiaux japonais, montre, chez lui aussi, l’influence des maîtres de l’estampe. 

Cet article a été publié dans L'ŒIL n°594 du 1 septembre 2007, avec le titre suivant : Les frères Beggarstaffs, Klimt, Penfield... En matière d’affiches, chaque nation possède son champion

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