Comment l’œuvre nous transmet une histoire

Par Bénédicte Ramade · L'ŒIL

Le 1 mai 2006 - 317 mots

Le Centre national d’art contemporain de la Villa Arson s’offre un printemps à l’occasion d’un changement de directeur, sous le signe d’un passage de témoin entre générations d’artistes mais également de l’œuvre comme média ou relais, diffuseur d’idées. Les œuvres contemporaines endossent ces divers rôles, douées d’un « coefficient de transmission » variable, comme le démontre l’articulation parfaite de trois propositions.
L’histoire tout d’abord, avec le Poïpoïdrome de Robert Filliou et Joachim Pfeufer. Imaginé en 1963 comme un centre de création permanente, il prend forme en 1975 pour être réactivé par la suite sous différentes configurations.
L’ensemble visuellement détonnant, débridé et joyeux, mêlant philosophie et objets du quotidien, se nourrit des commentaires de ses visiteurs. Il vit. Un lien tout trouvé avec l’objet de communication même : le fanzine, le magazine, l’autocollant, la brochure et bien sûr le livre. Sur les 9 000 documents collectionnés par le Centre national de l’estampe et de l’art imprimé de Chatou, 400 de ces outils sont exposés.
Regrettons que leur lecture nous soit refusée car il y a des trésors comme Artfan, magazine australien ouvrant ses colonnes aux comptes-rendus de fans, du pompier au critique d’art, sans distinction de valeur !
Jeremy Deller, Turner Prize 2004, se plaît aussi à bousculer ces hiérarchies en analysant la culture populaire et s’exprimant avec des vidéos, des posters et autres badges. Cette monographie bien articulée au principe directeur permet de découvrir ce travail souvent documentaire qui rend visible des communautés. Comme celle de ces grévistes mineurs anglais, molestés en 1984 par les forces de l’ordre, à qui Deller offre de reconstituer cet événement à la manière des grandes batailles de l’Histoire. L’artiste comme opérateur de la mémoire collective transforme ici son implication dans le réel en aventure politique magistrale. Parce que la transmission est surtout une affaire de conscience.

« Transmissions », La Villa Arson, 20, rue Stephen-Liégeard, Nice (06), www.villa-arson.org, jusqu’au 4 juin 2006.

Cet article a été publié dans L'ŒIL n°580 du 1 mai 2006, avec le titre suivant : Comment l’œuvre nous transmet une histoire

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