Photographie

La photo japonaise

Par Christine Coste · L'ŒIL

Le 21 décembre 2017 - 803 mots

La photographie japonaise a le vent en poupe. L’exposition « Japanorama », à Metz, élargit les visions communes portées sur elle.

Collectionner -  Les noms de Moriyama ou d’Araki sont devenus familiers. Pourtant, il y a à peine quinze-vingt ans, ils n’étaient référencés en France que par un petit groupe d’initiés. La Fondation Cartier a été la première institution a consacrer une exposition à Araki, en 1994, et à Moriyama, en 2004. Shoji Ueda et Masao Yamamoto sont devenus d’autres noms référencés grâce à la galerie parisienne Camera Obscura, pendant longtemps la rare enseigne à donner une visibilité aux photographes japonais. La scène photographique nipponne bénéficie désormais d’un fort engouement, et les expositions se multiplient. « Provok » au Bal en 2016 ou « Mémoire et lumière » à la Maison européenne de la photographie en 2017 ont mis en lumière quelques dynamiques propres à cette scène.

Aux Rencontres d’Arles 2015, « Another Langages » rappelait toutefois qu’à part ce petit groupe de noms célèbres aucune manifestation contemporaine ne s’est encore « attachée à analyser la complexité et la diversité de la photographie japonaise tant dans ses formes historiques que contemporaine ». Or, ce n’est pas dans la programmation de « Japonismes », saison du Japon en France en 2018, qu’on trouvera ce rendez-vous d’envergure, aucune exposition photo n’ayant été envisagée.

Seul « Japanorama », actuellement au Centre Pompidou Metz, engage donc une réflexion sur les mouvances successives qui, depuis Daido Moriyama jusqu’à la photographe Rinko Kawauchi ou Lieko Shiga, prônent « la photographie personnelle via l’évolution de l’enregistrement objectif vers le souvenir subjectif ». De génération en génération, se sont en effet développées des mouvances successives de photographes de l’intime en prise avec leur expérience du monde et leur souci de mémoire.

Ses « expressions de la subjectivité, qui plonge ses racines dans le Shishostesu, genre romanesque autobiographique du tout début du XXe siècle, sont à la fois de l’ordre de l’intime et investies d’une dimension universelle », explique dans le catalogue Yuko Hasegawa, commissaire de l’exposition. À Metz, la directrice du Musée d’art contemporain de Tokyo n’oublie d’ailleurs pas d’inclure dans son propos la vision de femmes photographes jusqu’il y a peu quasi invisibles, à commencer dans leur propre pays.

40 000 €
1 - YUKI ONODERA - Les corps ou les visages chez Yuki Onodera (1962) projettent dans des fables ou des récits baroques. Muybridge’s Twist n° 41, comme les autres collages de cette série, réunit dans une seule figure des fragments d’images de corps d’humains ou d’animaux en mouvement qu’elle chorégraphie en déséquilibrant postures et gestes. Le trait bleu souligne les limites de chaque partie collée sur toile. Chaque pièce de cette série de grand format (304 cm x 210 cm) est unique. Elle est proposée à 40 000 € par Pierre-Yves Caër Gallery à Paris.
Pierre-Yves Caër Gallery

2 500 - 10 000 €
2 - DAIDO MORIYAMA (1938) publiait en 1972 le premier numéro de Record, fanzine de photographies imprimées pleine page. Le n° 24, édité en octobre 2013, contient des images de son voyage en France durant l’été de la même année, dont ce champ de tournesols. Le prix de ce tirage pigmentaire varie de 2 500 à 10 000 € selon le format. « Sur le second marché, le niveau des ventes est plus élevé », note le galeriste Jean-Kenta Gauthier, en sachant que « pour la photographie japonaise, les prix importants sur ce marché se réalisent en privé. Mais on commence parfois à voir en ventes des enchères consistantes ».
Galerie Jean-Kenta Gauthier

30 000 - 34 000 €
3 - HIROSHI SUGIMOTO (1948), depuis plus de trente ans, photographie des mers adossées à des cieux. Regroupées sous le titre de Seascapes, ses images incarnent une poétique empreinte d’une grande sérénité. Elle est la série la plus demandée. Ses prix s’envolent. Lors de la vente de la collection du décorateur Jacques Grange en novembre 2017 chez Sotheby’s, Seascapes. Black Sea, Ozuluce (1991) a été adjugée 417 000 €. Les premiers prix des dernières pièces réalisées en mer de Tasmanie en 2016-2017, comme cette épreuve gélatino-argentique, débutent à 30 000-34 000 € chez Marian Goodman.
Galerie Marian Goodman

10 000 €
4 - SHOJI UEDA (1913-2000) n’a jamais numéroté ses tirages. Ce petit format (31,5 x 21 cm) tiré du livre Warabe Goyomi (Le Calendrier des enfants, 1971) n’y échappe pas. La rareté des tirages sur le marché conduit néanmoins à des prix élevés. 10 000 € pour ce portrait bien que cette série ne soit pas la plus recherchée contrairement à l’emblématique Sakyû (Les dunes) aux photographies de mise en scène de sa famille ou de lui-même sur des dunes, quasi introuvables. Camera Obscura avait pu disposer pour Paris Photo 2015 de trois belles photographies. La galerie les avait vendues avant même l’accrochage, deux pour 13 500 € chacune, et une dans un format plus grand à 20 000 €.
Galerie Camera Obscura

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Cet article a été publié dans L'ŒIL n°708 du 1 janvier 2018, avec le titre suivant : La photo japonaise

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