Art contemporain

Un siège de l’impressionnisme

Par Christian Simenc · L'ŒIL

Le 21 décembre 2017 - 439 mots

Rouen -  Impossible de le manquer. Depuis le pont Guillaume-le-Conquérant, au sortir du centre-ville de Rouen, on ne peut s’empêcher de porter le regard à tribord sur cet intrigant bâtiment juché sur la rive gauche de la Seine : le nouveau siège de la Métropole Rouen Normandie – soit la municipalité rouennaise plus 70 communes alentour –, œuvre de Jacques Ferrier.

De prime abord, c’est sa forme qui interpelle. L’ensemble se compose de deux ailes oblongues et parallèles, dont les proues se relèvent tête-bêche. « La silhouette du bâtiment est inspirée de l’ambiance portuaire, explique Jacques Ferrier. Je ne voulais pas d’une construction trop “épaisse”, d’où ces deux “nefs” accolées avec, de part et d’autre, un effet de soulèvement qui évoque l’étrave d’un navire. Cet effet rappelle aussi le côté dynamique des grues du port et l’allure industrielle des anciens hangars portuaires. » Comme le souligne l’architecte, la structure de béton, par endroits subtilement laissée brute, est basique (« quasi biblique »), en clair : les espaces, géométriques, logent les bureaux en façades ou autour de la « faille » intérieure qui s’étire entre les deux ailes. Cet « entre-deux » permet de faire entrer la lumière naturelle et de générer des lieux intermédiaires, terrasses et patios, couverts ou pas. Au sixième étage, ou belvédère, on distingue à l’envi la structure métallique soutenant la multitude d’auvents qui composent la peau extérieure. « Nous ne sommes pas dans des modules hyper-dessinés façon Renzo Piano, ni dans du low-tech à la manière de Lacaton & Vassal, mais dans une écriture de la simplicité, un brin massive mais touchante. Une technique bien visible et donc compréhensible, à l’instar d’un Meccano. La beauté vient de cette clarté de la construction, ce que j’appelle “la poésie des choses utiles”. »

De là-haut, se déploie un panorama à 360° scandé par deux monuments phares : le pont levant Gustave-Flaubert, à l’ouest, et, à l’est, la flèche de la cathédrale Notre-Dame. De cette dernière, Jacques Ferrier tire son autre grande inspiration. « Avec sa célèbre série de toiles représentant la cathédrale à différents moments de la journée, Claude Monet a démontré qu’une même architecture pouvait être lue de manière complètement différente. » D’où ce travail sophistiqué sur la peau du bâtiment : « C’est une façade impressionniste », s’amuse Ferrier. Grâce à un verre dichroïque, l’aspect de l’édifice se fait sans cesse changeant. Sur la trentaine de toiles représentant principalement des vues du portail occidental, que Monet peint entre 1892 et 1893, il concocte une délicate palette de nuances : d’un Brouillard matinal à une Symphonie en gris et rose, en passant par une Harmonie bleue et or, en plein soleil, ou, plus trivialement, un Temps gris et un Soleil couchant.

 

À savoir
Réunissant bureaux et espaces de réunion, de réception ou d’exposition, le nouveau siège accueille, depuis juillet, 320 des 1 500 employés de la Métropole Rouen Normandie. Surface : 8 300 m2 ; coût des travaux : 25 millions € HT. Premier édifice du futur écoquartier Flaubert à venir, il arbore sur la façade sud, celle sur rue, et sur le toit quelque 2 500 m2 de panneaux photovoltaïques.
À voir
Métropole Rouen Normandie, 108, allée François-Mitterrand, Rouen (76). www.metropole-rouen-normandie.fr

 

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Cet article a été publié dans L'ŒIL n°708 du 1 janvier 2018, avec le titre suivant : Un siège de l’impressionnisme

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