Paris-16e

Camille Henrot fait son show

Palais de Tokyo - Jusqu’au 7 janvier 2018

Par Vincent Delaury · L'ŒIL

Le 22 novembre 2017 - 335 mots

Après Philippe Parreno (2013) et Tino Sehgal (2016), c’est au tour de Camille Henrot, née en 1978 à Paris et vivant à New York, de se voir offrir une carte blanche lui accordant tout l’espace du Palais de Tokyo pour y déployer sa pratique transversale et orchestrer une interaction entre visiteurs et artistes – six sont invités par elle : Jacob Bromberg, David Horvitz, Maria Loboda, Nancy Lupo, Samara Scott et Avery Singer –, afin d’y aborder l’art tel un archipel s’ouvrant à la compréhension du monde.

Empruntant son titre « Days are Dogs » à l’expression anglo-saxonne dog day, qu’on peut traduire par « une vie de chien », la jeune plasticienne, lauréate du Lion d’Argent de la 55e Biennale de Venise avec son film Grosse Fatigue, agence sa scénographie en sept parties distinctes correspondant aux sept jours de la semaine. Pour l’artiste, « la semaine régit ce qu’il y a de plus personnel chez un individu : la fréquence à laquelle il se repose ou travaille, celle avec laquelle il rencontre les exigences de la vie sociale et de sa propre santé. »

Fidèle à sa démarche consistant à s’appuyer sur un programme pour le dynamiter de l’intérieur via un grain de sable venant gripper la machine, Camille Henrot relève haut la main le défi de son « one-woman show ». Rejouant son installation immersive The Pale Fox (2014), accumulation d’images et d’objets hétérogènes (histoire de l’art, sciences, pornographie, religion…) visant faussement à appréhender la globalité des savoirs, ce centre névralgique de l’exposition aux associations d’idées infinies, et autour duquel tout s’organise, montre avec maestria comment la plasticienne s’empare du numérique, ses images sont distribuées comme autant de fenêtres de navigateur, pour évoquer un flux d’informations nous faisant sans cesse osciller entre pulsion scopique et mélancolie, voire dépression ; le trop-plein visuel pouvant virer à l’asphyxie.

Bref, cette expo, mâtinant plaisirs et frottements, est à vivre telle une mise en abyme de nos existences contemporaines, dont la virtualité grandissante nous apparente souvent à des chiens errants voguant de site en site.

« Days are Dogs, carte blanche à Camille Henrot »,
Palais de Tokyo, 13, avenue du Président-Wilson, Paris-16e, www.palaisdetokyo.com

Cet article a été publié dans L'ŒIL n°707 du 1 décembre 2017, avec le titre suivant : Camille Henrot fait son show

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