Bourg-en-Bresse (01)

Georges Michel, sublime par intermittence

Musée du monastère royal de Brou - Jusqu’au 7 janvier 2018

Par Bertrand Dumas · L'ŒIL

Le 26 octobre 2017 - 484 mots

Le peintre Georges Michel (1763-1843), avant de tomber dans l’oubli, comptait nombre d’admirateurs, dont un certain Van Gogh qui louait ses paysages « tellement simples et beaux ».

Cet éloge est-il toujours d’actualité ? C’est l’expérience à laquelle convie le Musée du monastère royal de Brou, hôte de la première rétrospective consacrée depuis cinquante ans à ce paysagiste visionnaire. Cinquante-huit œuvres sont réunies, dont quarante-deux peintures et seize dessins. Ici, le paysage est roi, l’artiste s’y adonnant exclusivement. Sa carrière conserve sa part de mystère, puisqu’après son dernier envoi au Salon de 1814, Georges Michel disparaît des radars. Le peintre ne renoue avec le succès que de manière posthume, suite à la vente de son fonds d’atelier, en 1842, et, surtout, la publication de sa biographie par Alfred Sensier, en 1873. Ce retour en grâce éphémère compte ses zélateurs, dont le marchand Durand-Ruel. Il fut l’un des premiers à percevoir l’originalité du pinceau de Georges Michel, ce que montre bien la présente exposition. En l’absence de chronologie assurée, l’exposition qui se tiendra en janvier à la Fondation Custodia, à Paris, est organisée par thèmes. En guise d’introduction, un tableau peint à deux mains par Georges Michel et Jacques Swebach-Desfontaines montre des débuts encore néoclassiques. Dans la même section, figurent les deux seuls tableaux du maître qui soient signés et datés de 1827 et 1828. La Sablonnière et L’Orage montrent que, à 65 ans, Georges Michel n’a jamais dévié de son motif de prédilection : les environs de Paris et la campagne d’Île-de-France, qu’il peint selon les canons des paysagistes du Siècle d’or hollandais. Il emprunte à Ruisdael la prégnance du ciel dans ses compositions et à Rembrandt ses effets dramatiques de clair-obscur qui animent les premiers plans de ses tableaux. Les paysages de Michel affichent d’étonnantes variations de style sur un même thème. À la facture lisse des œuvres de jeunesse s’opposent des toiles tout en matière et empâtements à la manière du Paysage crayeux au moulin ou encore du spectaculaire, presque déroutant, Montmartre en hiver que n’aurait pas renié Courbet. Une dernière section, sous-titrée « l’apothéose du sublime », s’emploie à mettre en évidence la puissance et la singularité de la vision romantique de Georges Michel. Figure ici, en bonne place, Le Moulin d’Argenteuil se détachant sur un ciel battu par la pluie. Le tableau n’est pas enthousiasmant, comme un certain nombre de qualité inégale dans l’exposition. Il paraît surtout archaïque à côté de son voisin, l’inoubliable Paysage orageux, prêté par le Musée des beaux-arts de Lyon. Ce dernier, avec sa touche rapide, enlevée, voir fragmentée par endroits, est d’une modernité confondante, telle que Manet saura l’imposer trente ans plus tard. Plus haut dans le parcours de l’exposition, le petit Paysage de collines et celui au chasseur sont de la même trempe. Ils détonnent avec les autres, on les croirait peints par un autre. Pour la postérité de Georges Michel, on aimerait qu’il n’en fût jamais autrement. 

« Georges Michel, Le paysage sublime »,
monastère royal de Brou, 63, boulevard de Brou, Bourg-en-Bresse (01),www.monastere-de-brou.fr

Cet article a été publié dans L'ŒIL n°706 du 1 novembre 2017, avec le titre suivant : Georges Michel, sublime par intermittence

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