Explosion de couleurs

Un propos moins léger qu’il n’y paraît. En suggérant plusieurs éléments de réflexion, le parcours, dans les deux cours et les anciennes cellules, invite à apprécier la versatilité du phénomène chromatique. Si c’était une teinte industrielle ? Cela pourrait être, au fil des époques, celle des séries Tupperware. Si c’était une tradition artisanale ? Le boro japonais, vêtement populaire constitué d’un assemblage de morceaux de tissus teints à l’indigo. Si c’était… la ville de Bordeaux ? Figure majeure du graphisme, Irma Boom crée spécialement pour l’occasion un papier peint inspiré des nuances de la cité girondine, en référence à son ouvrage Colour Based on Nature. Le designer Pierre Charpin signe la scénographie ainsi qu’une installation rassemblant des créations d’Ettore Sottsass, Charlotte Perriand, Philippe Starck et Martin Szekely, mais aussi son monolithe vert fluo « ST5 », rappelant que la couleur peut être forme, décorative et jubilatoire. Mais aussi qu’il lui arrive d’incarner une fonction, au point de déteindre complètement sur certains objets usuels : jaune familier de la boîte aux lettres des PTT, rouge vif de l’extincteur d’incendie, orange répressif des tenues d’une prison étrangère, celle de Guantanamo. Aux antipodes de cet assujettissement du sens, les grands dessins de Pierre Charpin, coloriages artistiques renvoyant à sa formation de plasticien, invoquent, eux, la couleur comme une présence pure. Libératrice.