Architecture

La musicalité d'une île

Par Christian Simenc · L'ŒIL

Le 13 avril 2017 - 528 mots

BOULOGNE-BILLANCOURT - Sur la pointe aval de l’île Seguin, à Boulogne-Billancourt (Hauts-de-Seine), le « paquebot » Renault, ancienne usine phare du constructeur automobile, fait place, vingt-cinq ans pile après sa fermeture, à un autre « vaisseau » : un complexe culturel baptisé La Seine musicale.

Tout le monde aura compris le jeu de mots facile à propos du fleuve et de ce bâtiment construit par le duo Shigeru Ban (Japon) et Jean de Gastines (France), déjà auteur de la filiale du Centre-Pompidou, à Metz. De l’ancienne « forteresse ouvrière », le nouvel édifice, inauguré le 22 avril, a conservé quelques gabarits, mais surtout une présence, imposante et toute de béton gris, s’installant sur une parcelle de 2,35 hectares – soit près d’un tiers de l’île – et déployant, le long de la Seine, une longueur de 324 m. Surface totale : 36 500 m2. Coût des travaux : 170 millions d’euros.

La colonne vertébrale du projet consiste en une rue intérieure couverte et publique qui s’étire depuis le parvis jusqu’à la pointe aval, sur laquelle se connectent toutes les entités, culturelles ou commerciales. D’une part, des locaux pour l’orchestre résidant, des loges pour les artistes ainsi que quatre studios d’enregistrement et/ou de répétitions. D’autre part, des restaurants, des cafés et des commerces – « tournés vers les produits liés à la culture », dixit la plaquette. Sont évidemment desservis les deux espaces principaux : une grande salle de concert et un auditorium de 1 150 places. La première, modulable de 4 000 à 6 000 places, offre une impressionnante ouverture de scène de 35 m de long. Mais le volume phare de ce nouveau navire amiral musical se trouve indubitablement à la proue : un gigantesque ovoïde de verre maintenu par une armature de croisillons de bois, qui accueille l’auditorium. À l’intérieur du bâtiment, celui-ci est supporté par une forêt d’imposants piliers de béton inclinés. Une fois grimpé à l’étage, il faut ensuite franchir une deuxième « enveloppe » habillée de mosaïque verte irisée avant de pénétrer au cœur de cet espace dédié à toutes les musiques non amplifiées. Les sièges y sont disposés « en vignoble », autrement dit par balcons étagés tout autour de la scène. Le travail et la variété des revêtements de bois sont splendides. À l’extérieur, l’ovoïde est en partie protégé par une gigantesque voile mobile et massive de 45 m de haut, truffée de panneaux photovoltaïques. Montée sur rail et autoalimentée, celle-ci suit la course du soleil d’est en ouest, dans une amplitude de 180°.

À l’autre extrémité du bâtiment, un escalier monumental permet, depuis le parvis, d’accéder au toit-terrasse, sur lequel se déploie un jardin de 7 000 m2 dessiné par l’agence Bassinet Turquin Paysage. Au nord, côté Boulogne-Billancourt, une terrasse extérieure s’affiche en balcon sur la Seine. Au sud, côté Meudon, une promenade descend jusqu’aux berges du fleuve, à la pointe aval. On pourra même y accoster en bateau.

À savoir

« Le cahier des charges imposait de faire un bâtiment iconique, emblématique, a expliqué Shigeru Ban, le 3 février, dans l’émission de France Culture La Grande Table. J’ai essayé de concevoir l’édifice comme un navire avec une voile, de proposer une forme qui puisse identifier le lieu et interférer avec l’environnement. D’où cette voile qui bouge et qui, selon le moment de votre visite, modifie la forme du bâtiment. »

À voir

La Seine musicale, 1, cours de l’Île-Seguin, Boulogne-Billancourt (92), www.laseinemusicale.com

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Cet article a été publié dans L'ŒIL n°701 du 1 mai 2017, avec le titre suivant : La musicalité d'une île

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