Entre-nerf

L’estampe au pinacle

Par Colin Lemoine · L'ŒIL

Le 18 novembre 2015 - 320 mots

Comprendre une estampe, savoir la regarder, réussir à l’apprécier, cela n’est pas chose aisée. La faute à la nature – complexe – d’un domaine plein de petites nuances, de menus détails, d’immenses surprises, de secrètes subtilités, d’exceptions qui confirment la règle.

Nombreuses sont les publications qui ont tenté maladroitement d’inoculer au lecteur le goût du burin ou de l’eau-forte. Le présent catalogue d’exposition est, quant à lui, exemplaire : à partir des collections du Getty Resarch Institute de Los Angeles et de la Bibliothèque nationale de France, deux institutions qui regorgent de spécimens parmi les plus exceptionnels au monde, d’éminents spécialistes dressent un panorama époustouflant de l’estampe française sous Louis XIV (1660-1715) [Images du Grand Siècle. L’estampe française au temps de Louis XIV (1660-1715), BnF/Getty Resarch Institute, 368 p., 200 ill., 55 €]. Période fondatrice pour les siècles à venir, le règne du Roi-Soleil enregistra en effet desgravures d’une maîtrise insurpassée, que l’on veuille songer aux réalisations de Girard Audran, de Robert Nanteuil, de Gaspard Duchange (Le Repas chez Simon le Pharisien, 1705) ou de Gérard Edelinck (Israël Silvestre, avant 1691), tous ces artistes connus aujourd’hui de quelques rares amateurs mais qui, en leur temps, jouissaient d’une gloire certaine et se faisaient rétribuer leurs travaux en conséquence. À cet égard, le catalogue des œuvres, riche de cent neuf numéros, tous dotés de notices extrêmement complètes et de superbes illustrations, permet de prendre la mesure de la prolixité et de la virtuosité de ces graveurs décidés à rivaliser avec la peinture, qu’ils aient célébré le roi, portraituré leurs contemporains, composé des scènes religieuses ou livré des vues d’architecture. Consacrés aux éditeurs et aux collectionneurs, aux questions techniques et juridiques, aux enjeux sociaux et commerciaux, les textes liminaires sont tout à la fois pédagogiques et savants, animés par un souci de la transmission qui fait de cet ouvrage élégant une somme érudite et un album imagé, en un mot une anthologie incontournable.

Cet article a été publié dans L'ŒIL n°685 du 1 décembre 2015, avec le titre suivant : L’estampe au pinacle

Tous les articles dans Médias

Le Journal des Arts.fr

Inscription newsletter

Recevez quotidiennement l'essentiel de l'actualité de l'art et de son marché.

En kiosque