« Umwelt », un diamant coupant à redécouvrir

Par Céline Piettre · L'ŒIL

Le 22 septembre 2015 - 326 mots

Petit cadeau de ce Festival d’automne 2015 qui offre aux Franciliens l’opportunité de revoir l’emblématique Umwelt de Maguy Marin (jouée à plusieurs dates et dans différents lieux).

Depuis sa création en 2004, beaucoup de choses ont été écrites sur la pièce. Sur sa violence, sa radicalité (incompatible avec un soit-disant grand public), sa puissance de feu qui ravageait les gradins à chaque représentation, faisant claquer les fauteuils ou hurler de rage les spectateurs – jusqu’à ce que certains finissent par agresser la chorégraphe sur scène au Théâtre de la Ville ! Et pourtant Maguy Marin n’a rien d’un Jan Fabre ou d’un Roméo Castellucci. Ni nudités insolentes ni blasphème dans Umwelt. Tout juste une bande d’humains passant et repassant sur scène (de jardin à cour), coiffés d’une couronne ou maniant une lampe de poche. Mécanique de métronome que viennent dérégler une course endiablée ou un coup de pistolet. Ballet monotone, répétitif, irrésolu et insensible aux bourrasques de vent qui balaient en continu le plateau. Le tranchant d’Umwelt est chirurgical. Il ausculte le corps social sans donner le spectacle de ses viscères (histoire de ne pas nourrir la violence par l’image). Les gestes du quotidien (boire un café, fumer une cigarette, s’embrasser) s’accomplissent en faisant fi du vacarme environnant – une bande-son vrombissante, les râles des trains ou des bombes. Ici on ne s’aventure pas bien loin ; un quart du plateau à peine est occupé. Les danseurs avancent masqués derrière des plaques de métal disposées en quinconce, visibles – conscients ? – par intermittence. On s’isole, on se planque, on se retranche, laissant s’entasser les déchets au devant de la scène. Emporté par son propre rythme, que brisent quelques face-à-face ; prisonnier de sa posture. Implacable, Umwelt l’est indéniablement. Dure comme le réel. Mais belle aussi, d’une beauté terrible qui n’a pas pris une ride (voire s’est aiguisée avec le temps). Et si cette zone désertée, ce no man’s land exposé aux tirs, étaient une page à réécrire ?

Quoi ?
Umwelt de Maguy Marin.

Où et quand ?
Festival d’automne 2015. Mac de Créteil du 9 au 10 octobre. Théâtre de la Ville du 4 au 8 décembre. L’Apostrophe à Cergy-Pontoise le 11 décembre. Théâtre de Saint-Quentin-en-Yvelines le 9 janvier.

Comment ?
www.festival-automne.com

Cet article a été publié dans L'ŒIL n°683 du 1 octobre 2015, avec le titre suivant : « Umwelt », un diamant coupant à redécouvrir

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