Alexandre Hollan - À l’ombre d’un grand arbre

Par Vincent Delaury · L'ŒIL

Le 23 juin 2015 - 581 mots

Le monde de la nature est un monde très vivant dans lequel je me plonge trois à quatre mois par an et qui reste vraiment un océan en mouvement.

Le reste du temps, c’est un monde différent, c’est un monde qui ne bouge pas, qui reste dans l’attente et qui demande qu’on l’approche par la profondeur. C’est le monde des “vies silencieuses”, comme j’appelle les natures mortes. » Alexandre Hollan, qui est né à Budapest en 1933 et vit à Paris depuis 1956, passe une partie de l’été à Gignac, dans le sud de la France, au milieu des arbres. Le reste de l’année, il peint dans son atelier parisien. Représenté depuis 1994 par la Galerie Marie-Hélène de La Forest Divonne, cet artiste profondément contemplatif creuse le même sillon depuis plus de cinquante ans en portant son regard d’une limpidité absolue sur deux choses essentielles : la représentation des arbres (châtaigniers, chênes, oliviers) qui le fascinent, à travers des peintures acryliques et des fusains, et l’étude approfondie, via des aquarelles aux tons sourds de pots, cruches et fruits rongés par le temps, qu’il appelle « vies silencieuses ».

Chemin faisant avec le poète Hollan
Après avoir connu dernièrement des expositions importantes, notamment au Musée des beaux-arts de Budapest en 2011 et au Domaine national de Chambord en 2013, le très discret Hollan connaît cet été la consécration dans l’Hexagone avec trois belles expositions qui reviennent sur son parcours atypique et son cheminement singulier, en dehors des modes, dans la sphère artistique : le Musée d’art, d’histoire et d’archéologie d’Évreux (Eure), l’abbaye de Noirlac (Cher) ainsi que le château de Poncé dans la Sarthe, qui appartient à son ami peintre Guy de Malherbe et à sa dynamique galeriste parisienne, dévoilent une série d’œuvres (peintures, dessins, livres d’artiste) témoignant d’une vie pour l’art. Après avoir quitté Budapest en 1956 pour fuir les chars russes, le jeune Alexandre a mené une vie nomade en parcourant la France en voiture de 1962 à 1987, année où il acheta son mazet dans l’Hérault pour vivre au plus près de la nature, de ses lumières, vibrations et forces invisibles : inlassablement, année après année, il trace un réseau de lignes dansantes sur de vastes fonds, souvent blancs, afin de faire ressortir l’élan vital de « l’arbre de vie », et il peint des objets familiers, apparemment sans qualité, en effectuant d’infinies variations sur le motif pour révéler, au-delà de l’image, la vérité intérieure des choses.

Être devant une feuille ou une peinture signée Hollan, c’est ressentir, comme chez les maîtres qu’il admire (Poussin, Morandi), quelque chose de l’ordre de l’indicible. Avec une grande économie de moyens (le papier labouré par la couleur, la ligne serpentine sur la toile), ce plasticien très mystique parvient, à l’instar des artistes zen, à faire émerger par-delà les figures (arbres, objets) la fougueuse énergie qui les habite ; « Je suis ce que je vois », précise ce grand méditatif qui, en épuisant le motif, nous fait partager « l’expérience de voir » afin de capter, au sein de la réalité apparente du monde, le surgissement de l’inconnu.

Repères

1933
Naissance à Budapest, en Hongrie

1956
École des beaux-arts de Paris

À partir de 1962
Vie de nomade à bord de sa 4-L-atelier. Peinture sur le motif

1984
Fin de sa vie de nomade et installation dans l’Hérault

1995
Parution de la monographie La journée d’Alexandre Hollan par Yves Bonnefoy

2014
Exposition « Trente ans de Vies silencieuses » au Musée Ernest Herbert de La Tronche.
Il vit et travaille à Paris

« Alexandre Hollan : je suis ce que je vois »
jusqu’au 20 septembre. Musée d’art, d’histoire et d’archéologie, Évreux (27). Ouvert du mardi au dimanche de 10 h à 12 h et de 14 h à 18 h.
Entrée libre et gratuite.
www.evreux.fr

« Alexandre Hollan. De la ligne à la couleur »
jusqu’au 27 septembre. Château de Poncé, Poncé-sur-le-Loir (72). Jusqu’au 14 juillet, ouvert le samedi et dimanche de 14 h à 18 h. Du 15 juillet au 31 août, ouvert du jeudi au dimanche de 14 h à 19 h.
Tarifs : 6,5 et 4,5 €.
Commissaire : Marie-Hélène de la Forest Divonne.
www.chateaudeponce.com

« L’escale estivale d’Alexandre Hollan et Jean-Luc Meyssonnier »
jusqu’au 20 septembre 2015. Abbaye de Noirlac, Centre culturel de rencontre, Bruère-Allichamps (18). Tous les jours de 10 h à 18 h 30.
Tarifs : 7 et 4,50 €.
www.abbayedenoirlac.com

Cet article a été publié dans L'ŒIL n°681 du 1 juillet 2015, avec le titre suivant : Alexandre Hollan - À l’ombre d’un grand arbre

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